Sur la réalité, la nature, l'ampleur, les responsabilités... de l'épouvantable famine en Ukraine en 1933, un débat fait rage entre une "mouvance" communiste emmenée par l'historienne Annie Lacroix-Riz et les associations franco-ukrainiennes.
Salut Francis,
En fait, je refuse à Annie Lacroix-Riz le qualificatif d'historienne. Je l'ai déjà prise en flagrant délit de manipulation de documents, dans le cadre de la controverse relative à Pie XII. Malheureusement, le forum où se trouvait ma démonstration a disparu - et le fichier de ma démo a disparu lorsque la mémoire de mon PC s'est vidée suite à l'action d'un virus.
Pour faire bref : Annie Lacroix-Riz prétendait que Pacelli était un antisémite
völkisch, plutôt en phase avec certaines idées d'un certain parti national-socialiste dans les années vingt, brandissant en guise de preuve la correspondance de Pacelli de cette époque.
En réalité, un document - et un seul - pouvait
laisser supposer que Pacelli entretenait
peut-être certains préjugés à l'encontre des Juifs, à savoir une lettre écrite dans le contexte bordélique de l'agitation communiste post-11 novembre 1918 en Allemagne, et qui relatait une altercation entre Pacelli et un communiste allemand qui s'avérait être juif. Rien de bien méchant, en fait. Le document est même si bénin que les plus sévères contempteurs de Pie XII, tel John Cornwell, se refusent à rejoindre Annie Lacroix-Riz sur ce terrain.
Et voilà qu'Annie Lacroix-Riz, tout en s'efforçant de réhabiliter l'URSS stalinienne, nie carrément l'existence des atrocités du Petit Père des Peuples en Ukraine. Quitte à sélectionner des documents, à contester maladroitement les bilans établis par des historiens dignes de foi et à se référer à des travaux négationnistes typiques - par ex. et au hasard : le très minable opuscule du négationniste stalinien Douglas Tottle,
Fraud, Famine and Fascism. The Ukrainian Genocide Myth from Hitler to Harvard, opuscule si minable qu'il se réfute de lui-même. Tottle est à l'historiographie du stalinisme ce que le négationniste canadien John Ball (
) est à l'historiographie du nazisme : l'apparence d'un expert photographique qui dissimule mal une réalité clownesque.
Que François Delpla souscrive à la plupart des assertions frauduleuses d'Annie Lacroix-Riz - alors que, de son propre aveu, il connaît mal les faits entourant la famine en Ukraine - en révèle finalement bien plus sur la nature du personnage.
Il prétend d'ailleurs que cet événement attend son historien. Mais s'il s'était pris la peine de se renseigner, il saurait que cet historien existe déjà. Sans doute a-t-il entendu causer de Robert Conquest, l'auteur de
La Grande Terreur consacré aux purges staliniennes des années trente.
Conquest a publié
voici vingt ans un ouvrage traitant des méfaits de la collectivisation soviétique,
Sanglantes Moissons, traduit et publié en France en
1995 aux éditions Robert Laffont (collection "Bouquins").
Le bouquin n'est pas totalement parfait. Conquest, comme cela lui arrive occasionnellement (rarement, donc), bâcle certains points qui auraient mérité une attention plus poussée. De plus, il n'a pas eu accès aux archives soviétiques elles-mêmes - il se trouve toutefois que ces dernières n'ont pas remis en cause l'essentiel de ses apports.
Sanglantes Moissons constitue incontestablement un travail pionnier en la matière. La preuve ? Les négagas du camp d'en face, de Tottle à Lacroix-Riz, n'ont pas été fichus de le réfuter efficacement.
En gros et pour faire bref : faut l'acheter.