Souhaitant quitter un moment le champ de LdG, j'ai commencé le livre de Dominique Lacout et Christian Lançon La mise à mort de Jean-Edern Hallier paru aux Presses de la Renaissance fin 2006. C'était en vain et voici pourquoi : on sait que l'écrivain pamphlétaire vécut dès 1982 en état de guerre (guerilla plutôt) ouverte avec François Mitterrand à qui il reprochait d'avoir trahi tous les idéaux de gauche et un passé trouble. Sans ouvrir une digression sur le provocateur patron de L'idiot International, il faut tout de même rappeler que Hallier était toujours très bien informé de certains moments de la vie du président, particulièrement pendant la période trouble où le décoré de la francisque prétendait avoir mené un vrai double jeu dangereux entre Vichy et la Résistance.
Au départ, il y a un Compagnon de la Libération, Michel Pichard décoré pour avoir commandé les opérations du BOA. Un extrait de sa biographie sur le site de l'Ordre : Affecté au réseau de la Confrérie Notre-Dame (CND) sous le commandement de Gilbert Renault alias Rémy, il débarque en France début janvier 1943, dans le sud de la Bretagne. Après trois mois passés à travailler à Paris pour la CND, Michel Pichard est affecté à l'Organisation Civile et Militaire (OCM) et, à partir de mai 1943, passe de la branche renseignements à la branche action et plus spécialement au Bureau des Opérations Aériennes (BOA). Il est chargé de former des équipes, de repérer les terrains de parachutage, etc. En juillet 1943, il devient chef national du BOA.
L'hiver 1943-1944 est marqué par la répression allemande et, le 21 mars 1944, alors que Michel Pichard se trouve à Londres, tout le personnel de son bureau parisien est arrêté sur dénonciation. Revenu en France, "Pic" doit remonter un nouveau réseau et, en mai 1944, il quitte Paris sur ordre pour installer son P.C. à Vesoul. (...). C'est cette période qui intéressait particulièrement Jean-Edern Hallier et Michel Pichard avait des choses à raconter sur l'entrée en résistance et sur l'engagement réel du futur chef de l'Etat. Je reviens au livre de Lacout et Lançon, page 186 :
L'automne 1943 fait titiller les attentistes qui se demandent s'il n'est pas opportun de changer tranquillement de camp.(...) Mitterrand est du lot. Pétain envisage même de faire une déclaration à la radio le 13 novembre 1943 allant en ce sens, déclaration interdite in extremis par le gouvernement du Reich. Deux jours plus tard, le 17 novembre (43), Mitterrand fait son premier voyage pour Londres, puis Alger où il rencontre de Gaulle dont il refuse d'exécuter l'ordre : fusionner les associations de prisonniers.(...).
Le futur ministre de la IVe République rallie la Résistance six mois avant le débarquement allié en Normandie... Il était temps ! Entre-temps on l'a aperçu dans la gare d'Angers où un contact le conduit à bicyclette dans la campagne du (...) côté de Seiches-sur-le-Loir. Là atterrit un avion venu de Londres duquel débarquent une demi-douzaine d'individus qui seront tous arrêtés par la Gestapo. Un certain Pichard, qui s'occupe de l'organisation des vols de la Résistance, raconte qu'un nommé Déricourt, (...), est en contact avec un de ses anciens collègues, mais qui, lui, fait partie des services de renseignement allemands. (note : l'Abwehr) Il aurait servi de relais. C'est ce qui explique que François Mitterrand, plus tard, dans "Ma part de vérité", prétendra s'être rendu à Londres à bord d'un Lysander, avion biplace et non d'un Hudson, avion qui peut contenir 7 à 8 personnes. Version qui le dédouannerait des soupçons portés sur lui. Mais version démentie par Michel Pichard, Compagnon de la Libération, qui contrôle alors tous les vols, et certifie que l'avion transportant Mitterrand était bien un Hudson et pour une raison simple : aucun Lysander n'a pris l'air cette nuit-là ! Jean-Marie Bourget, grand reporter à Paris-Match (...) a bien connu Michel Pichard. Il raconte, en particulier, que celui-ci est décédé mystérieusement le 11 septembre 1989 (cf bio sur le site de l'Ordre) alors qu'il était en train d'écrire un livre de souvenirs révélant des vérités dérangeantes sur les activités de François Mitterrand durant cette période pour le moins obscure de sa vie... (p.188)
Selon le témoignage de De Boissieu, alors aide de camp de Charles de Gaulle, le chef de la France libre se méfiait de Mitterrand qu'il considérait comme un agent allemand infiltré ! Revenons à Déricourt.En 1947, devant la Haute Cour où cet agent triple comparaissait, François Mitterrand affirma que Déricourt était un authentique patriote. (Déricourt disparut lors d'une mission secrète au Laos... Encore un témoin gênant possible éliminé...)
On rappelera encore que le général de Boissieu a démissionné de son poste de grand chancellier de la Légion d'honneur en mai 1981 pour ne pas devoir décorer le nouveau président...
C'est assez troublant, et il faudra bien sûr vérifier dates et sources, mais le silence définitif de Michel Pichard, résistant impeccable responsable d'un service essentiel, le BOA, arrangeait bien le Président en 1989, avant que son passé vichyste et ses amitiés cagoulardes ne remontent à la surface durant les années 1990.
RC
Michel Pichard © Ordre de la Libération |