Cette énumération de textes (plus xénophobes qu'antisémites) et de conseils de ministres prouve que la philosophie politique générale de Vichy à cette époque était fortement teintée de maurrassisme.
Or, il n'y a rien de nouveau à le dire. Robert Aron l'avait fort bien vu dès 1954. Deux influences, dit-il, s'exercèrent au sein du premier cabinet formé alors: celle de l'Action française et celle de la démocratie chrétienne d'Emmanuel Mounier. Le Maréchal arbitra leurs différends.
La défaite avait fortement (et provisoirement) entamé le crédit des valeurs démocratiques. Ce climat intellectuel porta même un nom, celui de "divine surprise".Il fut "l'air du temps".
Or, il a beau être furieusement démodé aujourd'hui du fait de l'opération de sauvetage réussie de la grande démocratie américaine vis à vis des dictatures tant de droite que de gauche, ce climat-là avait sa logique sociologique propre.
Les "Droits de l'Homme", c'est bien joli, mais "Primum vivere". Or, en juillet 40, on était dans la problématique de savoir si la France, cette unité de dix siècles, allait vivre ou mourir.
Se moquer de nos pères, si souvent maurrassiens, est une attitude qui offense l'Histoire. Ils n'avaient pas le don d'Adèle et ils pensaient et agissaient en fonction des données politiques du moment.
Et, de toute façon, ce statut des Juifs du 3, du 4 ou du 18 octobre (quelle importance ?) fut un mal pour un bien. Il fallait empêcher les Allemands de priver l'Etat français de ses droits à gouverner en zone occupée (prélude à la mort du pays) et prendre les devants au moment où ils s'apprêtaient à usurper nos droits en instituant les Lois de Nuremberg dans cette zone.
Grâce à cette sage précaution, lorsque vint le moment de la solution finale en Z.O., en mai 42, Vichy n'était pas hors jeu et put discuter avec la SS de Himmler et de Heydrich, représentée en France par Oberg et Knochen. De là sont donc sortis les négociations et les dispositions atténuatrices qui firent que le sort de la communauté juive de France fut "relativement clément".
Reprocher le statut des juifs à Vichy est une aberration. |