L'étude du mouvement SS tout entier en est à ses débuts. C'est elle qui a le plus souffert à Nuremberg : Kaltenbrunner était tout seul pour représenter l'organisation et il s'est défendu en excipant de son faible poids. Imaginez les autres ! Himmler cuisinait tout à leur insu... voire à celui de Hitler. Voilà pour la défense. Quant à l'accusation, l'existence d'un bouc émissaire n'était pas non plus pour lui déplaire : elle permettait d'étalonner la culpabilité de chacun suivant sa distance supposée avec l'ordre noir, d'où la blancheur de Schacht et de Papen, et le gris de Speer.
Cette façon parfaitement moralisatrice et anti-historique de présenter les choses faisait que l'histoire restait dans les starting-blocks.
On commence tout juste à s'intéresser à la diffusion précoce et fine du poison dans l'appareil d'Etat. Mon dernier livre sur Mandel participe de ce mouvement, par exemple lorsque je relève (ce que n'avait pas fait le livre pourtant novateur de Barbara Lambauer) qu'Abetz était un SS détaché dans la diplomatie. Voir aussi le dernier livre d'Edouard Husson, qui montre l'esprit génocidaire doucement instillé aux forces armées dès l'entrée en Pologne.
Ces recherches ne m'incitent pas et n'incitent, je crois, personne, à concevoir, avant la mort du Führer, un retournement de cet appareil. Les manifestations, bien réelles, de ce retournement ne sont confirmées par aucun document allemand d'époque, et ne sont connues que par des comptes rendus de conversations entre des SS et des émissaires anglais, américains ou neutres. On est en guerre, ces gens causent en direction des oreilles ennemies et le premier degré n'est vraiment, vraiment pas de mise.
Et l'attitude récente d'Ollivier confine bel et bien à une interdiction de recherche.
Qui aurait cru que le confort nurembergeois le tentât ? |