Soixante ans après les faits, il est bien difficile de parler sereinement et sérieusement de certains sujets tels que la collaboration militaire. S'il est évident que celle-ci a été idéalisée par certains, et l'est sans doute encore, il faut bien constater que personne n'a le monopole de l'outrance comme le démontre le texte du "rédacteur Borovick".
Si certains faits avancés par Borovick sont exacts d'autres, en revanche, sont faux. Mais, surtout, l'auteur du texte tire des informations qu'il livre des conclusions pour le moins discutables.
Les erreurs tout d'abord, avec un exemple :
"Affectés en première ligne, ses deux bataillons passeront une semaine, cloués au sol par les obus soviétiques, devant Moscou en décembre 1941, avant de voir la presque totalité de ses effectifs rapatriée en France. "Démissionnaires", ces militaires, jugés inaptes au combat par les Allemands, n'auront connu de leur volonté de combattre le Bolchévisme, que le goût de la neige russe, sans jamais avoir affronté les soldats de l'Armée Rouge."
Contrairement à ce qu'écrit le camarade Borovick :
- La LVF se bat devant Moscou. Placée à la pointe de l'avance allemande, elle lance l'assaut le 1er décembre dans des conditions climatiques particulièrement rudes, sans équipement d'hiver, sans appui des panzers et après un semblant d'instruction. En face, la 32e division sibérienne, bien équipée et entraînée, est soutenue par l'artillerie soviétique. Après une semaine, le 1er bataillon n'est plus en état de combattre. Il a perdu une partie de ses officiers. Devant Moscou, les pertes du régiment de la LVF atteignent 500 hommes hors de combat. Ils s'ajoutent aux 400 soldats perdus dans l'hiver russe ou tombés malades avant même la mise en ligne de l'unité.
- Retirée du front, la LVF n'est pas "rapatriée en France" mais regroupée en Pologne pour y être réorganisée et épurée de certains éléments. Elle est ensuite engagée contre les partisans, une vraie guerre contrairement à ce que semble penser Borovick, où la mise en application des méthodes utilisées par l'armée coloniale française donne des résultats.
- Fin 1943, 400 hommes de la LVF bloquent pendant 36 heures les forces soviétiques le long de la rivière Bobr. Quatre attaques sont repoussées, 40 chars ennemis détruits, 65 légionnaires tués ou grièvement blessés... Versés dans la division Charlemagne, les survivants de la LVF vont poursuivre le combat contre l'Armée Rouge. En Poméranie puis à Berlin où s'illustrera un ancien LVF, Eugène Vaulot, décoré de la Ritterkreuz pour avoir détruit huit chars soviétiques au Panzerfaust. Sans doute un des ces "tordus", "nuls au combat", dont parle Borovick
J'arrête là avec les erreurs. De toute évidence, Borovick ne sait pas de quoi il parle. J'en viens à l'essentiel, à savoir les accusations portées contre les soldats de la LVF.
A ma connaissance, les faits rapportés par Borovick sont avérés. Le problème est que, de ces faits, Borovick tire des conclusions tout à fait abusives en parlant de "crimes de masse" commis par la LVF "en Pologne et en Bielorussie". Il va ainsi dans le sens d'un certain nombre d'internautes qui écrivent ici ou là que les massacres de civils russes par la LVF furent "systématiques", que des viols furent commis massivement etc...
- S'agisant de la Bielorussie, l'auteur du texte n'apporte hélas pas le moindre début d'élement pouvant laisser penser que... C'est un peu dommage au regard de la gravité des accusations portées.
- S'agissant de la Pologne, il affirme que tous les soldats de la LVF sont des violeurs sous prétexte que quelques uns d'entre eux ont violé une jeune Polonaise. C'est absurde. Comme il serait absurde de prétendre que tous les hommes de la 2e DB sont des violeurs sous prétexte du viol de deux adolescentes allemandes le 5 mai 1945 à Utting par huit soldats de la division Leclerc. De la même manière, il est évidemment abusif de faire de la LVF "une unité militaire au passé criminel" parce qu'une poignée de ses membres (vraisemblablement quelques dizaines d'hommes tout au plus) ont participé aux faits décrits par Borovick.
Pour le reste, à savoir le reproche adressé à certains militaires de la LVF d'avoir eu connaissance que des populations civiles, notamment juives, étaient employées comme main d'oeuvre forcée par les Allemands, on pourrait l'adressser aux habitants de tous les pays occupés ayant vu des trains de déportés, hommes, femmes et enfants, quitter les gares de leurs villes pour le territoire du Reich... Je ne parle même pas de la population polonaise.
"Le travail de recherche doit se poursuivre !" conclut Borovick.
Sur ce point, je suis d'accord avec lui car, en l'état actuel des connaissances sur le sujet, les conclusions du commissaire Borovick sont de tout évidence un peu hâtives. |