En ce qui concerne l'orientation politique de Masson, il paraît avoir eu un certain intérêt pour les solutions politiques, disons..., autoritaires. C'est certes assez dans l'air du temps, mais ça le distingue tout de même de bon nombre d'hommes de droite qu'il côtoyait et qui n'ont pas suivi ses aspirations jugées extrémistes - en particulier en ce qui concerne la presse.
Pour ce qui est de la collaboration avec les Alliés, la liberté d'action laissée aux chefs de postes récepteurs est une chose. Les stratégies adoptées pour se distancer de leurs activités en cas de problème (poursuites judiciaires) et la manière dont les subalternes ont été traités à la fin de la guerre en sont une autre. Et si on porte les succès du SR au crédit de son chef, il faut alors également lui imputer des épisodes bien moins glorieux.
A mes yeux, la grande différence entre l'exemple de Guisan et celui de Masson est que le Général a décidé d'adopter la stratégie du Réduit, mais que le chef du SR - du moins dans l'état actuel de mes recherches - n'a pas pris l'initiative de la collaboration avec les Alliés.
A propos de la stratégie du Réduit, je pense qu'elle a été mal comprise. On lui reproche principalement d'avoir mis le moyen pays, les femmes, les enfants et l'industrie à la merci du Führer. Il n'en est rien à mon sens. On oublie qu'il s'agissait d'une stratégie de dissuasion. Le véritable but était d'éviter une invasion, pas de maintenir un bastion de résistance dans les Alpes. Le jour où des troupes allemandes franchissaient la frontière, la stratégie avait échoué. Cela dit, le fait que la Wehrmacht n'ait jamais franchi la frontière ne signifie pas nécessairement - j'insiste sur ce terme - qu'elle ait fonctionné. Pour le savoir avec certitude, il faudrait se mettre dans la tête d'Hitler - ce que je préfère éviter - pour savoir quels facteurs ont été déterminants dans son attitude vis-à-vis de la Suisse. Dans tous les cas, elle n'a pas échoué.
De toute façon, mon opinion est que la véritable question n'est pas de savoir pourquoi le maître du IIIe Reich n'a pas envahi la Suisse, mais pourquoi l'aurait-il fait. Ce qui ne revient pas tout à fait au même...
Pour finir, il me faut préciser que ce sont les déclarations de Masson à la presse britannique qui ont engendré les attaques dont il a fait l'objet, et non l'inverse.
Mon souci n'est en aucun cas de ternir l'image de Masson. Il n'a pas démérité de la patrie, bien au contraire. Simplement, il n'est pas, à mon avis, LE héros du renseignement suisse. Bien d'autres, moins connus, relevés par ailleurs par mon directeur de thèse, Robert Belot, dans le rapport d'expert qui m'a été remis, mériterait bien mieux ce statut. |