François Delpla persiste à ne répondre à aucun de mes arguments, et se borne à répéter les mêmes "erreurs". On verra que cette méthode résulte de considérations tout à fait éloignées de la discipline historique.
Au fait.
> ... Nicolas, agrémenter d'injures un propos historiquement
> fouillé et charpenté ? Je t'assure que tu progresseras,
> d'un coup, en renonçant radicalement à ce genre de
> fioritures.
Des... injures ? J'ignore de quoi vous parlez.
Il y a des "erreurs" d'un côté, leur réfutation de l'autre.
François Delpla s'avère incapable de répondre au fond, d'où cette diversion. Pas de surprise.
> A moins précisément qu'elles ne jouent un rôle central, en
> fait, dans la "démonstration". Ce serait moi, à présent,
> le comploteur. J'essayerais, depuis le début, de mettre un
> meurtre crapuleux sur le dos de Churchill et ne reculerais
> pour cela devant aucune malhonnêteté.
C'est, en effet, le cas. Votre conditionnel est donc de trop.
Mais laissez-moi donc hasarder des hypothèses. Vous ne vous en privez pas, alors ne me déniez pas ce droit...
Lorsque, fin juin 2005, vous tombez sur le livre de Martin Allen, vous adhérez immédiatement à ce que vous qualifiez de "scoop apparemment imparable", à savoir le prétendu assassinat de Himmler à Lüneburg par les Britanniques (alors que plusieurs témoins dignes de foi avaient assisté à un suicide !), étayé par trois documents isolés et à l'authenticité si douteuse que je n'avais pas manqué de le faire valoir pour ainsi dire immédiatement.
Mais vous refusez de m'écouter - ou plutôt de me lire - et, comme cela arrive parfois chez vous, vous mettez à spéculer, imaginer je ne sais quel scénario ô combien fascinant, conformément à cette propension, détectée par votre jury de thèse, à "exagérer le rôle des complots et des manipulations". Et de l'imagination, nul n'ignore que vous en avez à revendre, ce qui n'est du reste pas un défaut lorsque l'intuition se voit confirmée par les sources accessibles.
Or, en l'occurrence, tel n'était - et n'est - certainement pas le cas.
Mais vous étiez si enthousiaste que pas un instant vous n'avez suspecté une falsification : "Le pifomètre ne suffit pas mais il est bien utile, il permet de chercher où il faut, de flairer les arnaques, etc. Là, il ne me met nullement en garde" (24 juin 2005).
Pas de chance ! Le 2 juillet 2005, le Daily Telegraph confirme que vos preuves ne sont autres que de vulgaires faux. Là où même Martin Allen s'est, de honte, écrasé, et là où quiconque aurait estimé que l'affaire était classée, vous avez... persisté.
Vous avez d'abord remis en cause l'intégrité et la compétence du journaliste, sur la base de nouvelles erreurs de lecture par vous commises : vous prétendiez - à tort - que ce journaliste avait qualifié de faux les trois pièces litigieuses le 2 juillet, puis avait "curieusement" abandonné l'accusation contre l'une d'elles le 9. Ce qui constituait, de votre part, une grossière erreur erreur de lecture. D'une part en effet, ses articles dataient du 2 et du 3 juillet, et d'autre part n'ont jamais prétendu que l'une des pièces ne méritait pas d'être qualifiées de faux. Au contraire, il soutenait - à raison, évidemment - que toutes l'étaient.
Mais vous avez refusé d'admettre l'évidence, refusé de vous tenir aux conclusions d'une experte qualifiée, ancienne chef de section "expertise" à Scotland Yard, et préféré voir dans la légitime et intègre prudence de cette dernière s'agissant d'un document une preuve que ledit document était fiable, alors que quiconque sait lire - et les propos de l'expert, et ce document - conclura à la falsification. Ce document surgi de nulle part ne peut se comprendre sans les autres faux auxquels il fait directement référérence.
Or donc, vous persistez. Himmler a été assassiné, les témoins ont menti. Lorsque vous examinez des témoignages formulés vingt années après les faits, et émanant d'individus enclins à camoufler leurs propres erreurs, vous vous arrêtez au premier degré, sélectionnez le témoignage qui vous arrange, proclamez qu'il révèle la vérité vraie, et examinez l'entier dossier sur le fondement de ses seules déclarations. Un fait ne colle pas avec les dires de votre témoin vedette ? Il est écarté. Un témoin contredit votre témoin vedette ? C'est un menteur. On rappelle que votre témoin vedette peut, au mieux, commettre quelques erreurs de mémoire ? Impossible : témoin-vedette est précis et fiable, il est donc infaillible... Ce n'est pas ce que j'appelle "agir en historien".
Mais cette dérive ne vous empêche nullement de distribuer les bons points et donner des leçons d'Histoire et de débat. Ainsi, je suis affublé de l'épithète "religieux" - il est toujours plus facile d'injurier que de me répondre au fond, n'est-ce pas ? Enfin, passons, j'ai l'habitude...
Par ailleurs, vous insinuez qu'un complot est à l'oeuvre. Si l'enquête traîne, c'est que ni les Archives, ni la police, ni Tony Blair ne veulent que la vérité se fasse jour. Quant au travail remarquable du Daily Telegraph, il est rattaché au grand complot : "En revanche, la frénésie avec laquelle on jette le soupçon sur l’ensemble des travaux d’Allen et l’exigence, sans processus contraignant et par une simple pression morale, du retrait du livre, semblent révéler un vif espoir que le dossier, à peine ouvert, soit refermé pour de longues années, en entourant tout poseur de questions d’une aura de suspicion" (27 août 2005).
Bref, vos affirmations selon lesquelles Himmler a été directement supprimé par les Britanniques subsistent. Sur une forme atténuée, compassée, prudente. Mais réelle.
En octobre 2005, vous vous rendez - enfin - aux archives britanniques. De toute évidence, vos découvertes vous ont quelque peu posé problème. Les éléments dénichés établissent en effet formellement la réalité du suicide. Après le scoop du Daily Telegraph, c'est un nouveau coup dur, pour vous. Alors vous cherchez à, d'emblée, préparer le terrain, comme en témoignent vos propos du 30 octobre : "Comme tous les ans ou presque, j’ai passé une semaine des vacances scolaires de Toussaint immergé dans les archives anglaises et je comprends un peu mieux ce qui a dû se passer dans les dernières heures de la vie de Himmler. Je dois réfléchir encore à la question elle-même, et aux conditions de la publication de mes découvertes."
Réfléchir, oui... Comment faire en sorte de reconnaître la réalité du suicide sans avoir l'air de passer pour un incompétent qui professait pourtant le contraire depuis des mois ?
D'emblée, vous laissez entendre que le mystère demeure : "Ce que je puis dire d’emblée, c’est que l’idée parfois émise ici que les Anglais ont ouvert depuis longtemps toutes leurs archives sur la question est hélas on ne peut plus fausse. Du moins on peut le supposer, ou plutôt l’espérer."
Ce qui reste du pur baratin.
Le 1er novembre 2005, après plus de vingt-quatre heures de réflexion, vous vous décidez enfin à poster votre message. Le contenu est habile. Tout d'abord, vous défendez plus que jamais votre témoin-vedette, et persistez dans l'inepte accusation de mensonge adressée à d'autres qui le contredisent. Et après plusieurs dizaines de lignes censées noyer le poisson, vous avouez - enfin ! - la chose suivante : "Nous pouvons donc, en suppléant les carences informatives qui restent profondément, et un peu plus chaque jour, préoccupantes, des autorités londoniennes, considérer que Himmler s’est bel et bien suicidé au moyen d’un poison violent (je vois d’avance frétiller le clavier de Nicolas)."
Eh oui : l'esprit "religieux" que j'étais avait raison, depuis le début. Et vous vous étiez lamentablement planté. En beauté. Magistralement. Mais il vous fallait encore atténuer davantage le propos : "L’heure est nettement plus douteuse. Et surtout, la provenance du toxique reste entourée du plus profond mystère."
Traduit en français courant : "Je n'avais pas tort, au bout du compte !"
Désormais, vous vous cantonnerez à cette version des faits : "sur le trajet entre le camp et la villa, le vainqueur a donné ou redonné au captif, à la romaine, les moyens de ne pas être attelé à son char de triomphe."
Vous allez donc sombrer dans le total n'importe quoi, et jouer sur les horaires pour prétendre que Himmler n'aurait pas été capable de conserver une capsule de poison dans sa mâchoire (alors qu'en réalité la chose est parfaitement possible) et attribuer au gouvernement britannique une sombre volonté de raccourcir la durée de détention du Reichsführer - on se demande bien pourquoi il laisse paraître le témoignage de votre témoin-vedette, qui la rallonge (mais contredit les documents accessibles, lesquels certifient que Himmler a été identifié vers 19 h, ce 23 mai). Vous allez également vous raccrocher à l'éventualité que Himmler aurait dégusté un ou plusieurs sandwiches, alors qu'un tel détail - pas d'autre mot - ne remet pas en cause la possibilité que le S.S. ait réussi à dissimuler cette capsule.
Bref, vous allez pratiquer du pur pinaillage, sans être le moins du monde capable d'avancer une version alternative crédible, ni même un mobile digne de ce nom qui justifierait un tel meurtre par suicide assisté.
Il est vrai que dès que vous êtes mis en difficulté, vous vous réfugiez derrière une nouvelle ligne de défense... Tout d'abord, vous avez nié avoir parlé de meurtre, puisque selon vous Himmler se serait effectivement suicidé... sous la pression et avec l'aide technique d'un fantasmagorique agent britannique. La réaction de tout pénaliste face à une telle définition du suicide sera évidemment d'être mort de rire, car il est de notoriété publique que le suicide assisté reste d'abord et avant tout un meurtre. Et lorsque tout le reste devient, chez vous, totalement intenable, vous vous limitez cette fois à vous poser en historien assoiffé de liberté, attendant impatiemment l'ouverture des archives pour statuer. Une telle prudence vous honore, vous qui n'aviez pas hésité une seconde à foncer tête baissée dans le scoop raté de Martin Allen !
En ce qui me concerne, ces éléments ci-dessus rappelés établissent que vous agissez moins, en l'espèce, en historien, qu'en individu tout bêtement incapable d'admettre avoir eu tort et soucieux de se défendre en semant le doute sur la véracité de certains faits établis. C'est une technique qui vaut ce qu'elle vaut - à comparer avec le total silence-radio de Martin Allen depuis 2005 - mais qui n'a rien d'historienne. Bref, votre attitude résulte de votre tendance au sensationnalisme et d'une incapacité flagrante à revenir en arrière. Mais, bien sûr, cet avis n'engage officiellement que moi... ;-)
C'est en cela que je vous reproche d'être irresponsable. Votre "thèse" fait le jeu des escrocs d'extrème droite, mais vous n'en avez cure, il n'y en a que pour votre égo. Bref, votre conception de l'Histoire est absolument dangereuse.
> A cela je réponds (et répète, mais résume) : je suis le
> seul, depuis juin 2005, qui ait fait un effort de
> documentation,
Vous n'avez pas produit un seul élément que nous ne sachions déjà.
Par ailleurs, vous refusez de prendre en considération les autres éléments qui vous sont fournis.
> il m'a permis de prouver que le témoignage
> de Murphy était léger et celui de Selvester solide,
Assertion maintes fois répétée, maintes fois réfutée...
> et d'en conclure qu'à un moment au moins Himmler n'avait
> pas de poison dans la bouche. D'où l'idée d'un
> fournisseur.
Là encore, assertion maintes fois répétée, maintes fois réfutée... Mais vous persistez !
> Seule certitude dans un océan de mystères.
Ou mensonge supplémentaire dans un marais de mauvaise foi ? |