Bonjour,
Je reprends les premières lignes du prologue à l'étude de Berlière et Liaiagre, des lignes qui, je trouve, posent bien le cadre général dans lequel les Bataillons de la jeunesse vont devoir agir :
Le 22 octobre 1941, à Châteaubriant, vingt-sept otages - la plupart membres du parti communiste - sont fusillé, deux jours après qu'un commando communiste a abattu le Feldkommandant Hotz à Nantes. Dans la France occupée, nul Allemand d'un grade aussi élevé n'a jusqu'alors été exécuté, même depuis que le parti s'est lancé dans la lutte armée à l'été 1941.
Cette nouvelle stratégie constitue un virage à 180 degrés. Contraint par le double pacte signé en août et septembre 1939 par l'Allemagne nazie et l'Union soviétique, le parti communiste a longtemps égaré ses militants - à commencer par ceux qui mourront à Châteaubriant - qui, au nom d'une guerre devenue "impérialiste", ont dénoncé tour à tour la République, l'Angleterre, la ploutocratie, le capitalisme et leurs responsabilités respectives dans le déclenchement du conflit et la poursuite de la guerre. A ces diatribes s'ajoute, à partir de juillet 1940, la dénonciation du régime de Vichy, mais aussi du général de Gaulle, "agent de l'impérialisme anglais", "allié du gouvernement anglais des lords et des banques", qui essaye - fort heureusement "en vain"... - de "persuader le peuple de France qu'il doit poursuivre la guerre pour le compte des financiers de la Cité." Longtemps les Allemands - avec lesquels le PC a d'abord demandé à ses militants de fraterniser - sont épargnés par ce concert de critiques véhémentes.
Ce silence durable - entrecoupé çà et là de quelques chuchotements dispersés - a culminé à l'été 1940, à l'heure où les hauts dirigeants négociaient la reparution légale de la presse communiste avec des autorités allemandes qui libéraient par centaines les camarades emprisonnés par la IIIe République. Le parti incitait alors ses militants à œuvrer au grand jour, à sortir de la clandestinité où ils s'étaient réfugiés depuis le décret Daladier du 26 septembre 1939, à réinvestir locaux syndicaux, permanences et mairies. Cette "illusion légaliste" aida grandement la police dans son travail répressif contre un parti toujours interdit.
Sachant cela, il est facile d'imaginer la confusion politique et les interrogations légitimes des petits cadres et des militants de base au moment où il fallut transformer l'ancien "soldat-camarade de la Wehrmacht" en cible fasciste...
Le mot de cafouillage idéologique semble à peine adéquat pour qualifier les méandres de la ligne officielle du parti entre août/septembre 1939 et juin 1941 !
Il sera(it) intéressant de retrouver les déclarations et surtout les justifications politiques des chefs du PCF à la Libération pour expliquer à la base la ligne officielle du parti durant ces 20 mois, entre 1939 et 1941.
On peut affirmer avec les deux auteurs que la tête du parti, à cause de sa politique de "l'illusion légaliste" est responsable des repérages et des arrestations des militants et des jeunes résistants de l'automne 1941. Comment ont-ils présenté cette attitude "légaliste" en 1944 - 1945 à la base ?
Bien cordialement,
RC |