Hunzinger, antidémocrate, antirépublicain, révolté par le Front Populaire ? Oui, comme une majorité des officiers d'active. Traître, ou simplement défaitiste ? Rien ne permet de l'affirmer ; et, pour porter une accusation aussi grave, il faut avoir des preuves, pas un faisceau d'indices dont aucun n'est significatif.
Le dispositif de la IIème armée est abérrant ? Oui, lorsqu'on connait la manoeuvre allemande. Gare à l'anachronisme et à la prévision post factum ! A priori, ce dispositif répondait aux instructions de Gamelin et de George : protéger le flanc gauche de la ligne Maginot. Huntzinger, comme tous les chefs d'armée, ne croyait pas au passage massif d'éléments motorisés par les Ardennes.
La passivité de Hunzinger après la percée du 13 mai ? Mais sait-on s'il est vraiment renseigné sur la situation réelle ? Pensez à Giraud, errant de village en village, quelques jours après, incapable de se faire une vue d'ensemble. Pensez aussi à Altmayer qui apprend, en juin, PAR HASARD que sa gauche s'est repliée de 30 km !
Quant aux arguments qui font état du vychisme de Huntzinger, ils vaudraient aussi pour de Lattre, Juin, Giraud et combien d'autres. Cela ne suffit pas à faire de ces hommes des traitres ou des défaitistes. Au contraire, Huntzinger, comme tous ses collègues, comme Henri Massis lui-même, est farouchement germanophobe.
Au final, je dirais que, hélas, Huntzinger est au niveau de la plupart de nos commandants d'armée de 40. Sans doute est-il un peu plus aveugle, plus courtisan, plus bardé de fausses certitudes que d'autres. Mais enfin, il est du même tonneau. Et c'est sans doute pour éviter de reconnaître cette tragique infériorité intellectuelle de nos chefs, que tant de Français se sont acharnés à chercher de la traîtrise là où il n'y eut que de la bêtise. |