Je crois qu’il y a deux aspects dans votre question.
Tout d’abord, la déposition « ignorée » de Barbie en janvier 1949. Tout ce que je sais, c’est qu’elle existe et qu’elle est archivée au ministère de l’Intérieur (peut-être d’ailleurs, Barbie a-t-il était interrogé plusieurs fois pas la police française). En revanche, je n’ai absolument aucune idée de ce que le gestapiste a pu dire ou ne pas dire à cette occasion. Ce qui me semble probable, c’est que cette déposition doit certainement être très intéressante du fait, d’une part, de la date à laquelle elle a été enregistrée, janvier 1949, donc durant l’instruction du second procès Hardy, et d’autre part parce que, comme je le disais précédemment, son existence va à l’encontre du discours officiel affirmant que le seul interrogatoire existant reste celui de 1948.
En ce qui concerne Caluire, je suis tout à fait d’accord avec vous pour regretter que l’on enlève trop souvent l’aspect politique de cet événement. A cet égard, désigner Hardy comme coupable arrange bien du monde. Il n’avait – selon ses accusateurs – aucune raison politique de trahir Moulin – ou la réunion – mais agissait seulement par peur pour lui, voire pour Lydie.
Restons sérieux, tout cela ne tient pas la route. En juin 1943, Moulin gênait politiquement trop de monde. A des titres divers, les gaullistes, les communistes et les membres de Combat souhaitaient l’écarter. Il y a trop de faits qui ne « collent pas » dans l’histoire de Caluire communément admise pour s’en contenter.
Bien sûr, ce qui rend un travail historique sérieux délicat, c’est que TOUS les intervenants dans cette affaire, du premier au dernier, du plus petit au plus grand ont menti.
Cette histoire, qui plus est, a été « élaborée » après la Libération et on peut penser qu’alors, ceux qui savaient la vérité avaient les moyens d’imposer celle qui les arrangeait et de faire taire ceux qui auraient pu lever le voile.
En bref, sur l’histoire vrai de Caluire, sur les vraies raisons de cette réunion, sur ses enjeux réels, tout reste à découvrir. On ne peut pas se satisfaire la culpabilité – jamais démontrée – de ce pauvre René Hardy, et s’endormir avec le sentiment du devoir historique accompli.
Bien cordialement,
JRG |