... je constate qu'il est très prudent.
P. 380-82, son analyse de l'exfiltration de Halina Szymanska vers la Suisse par les soins de Canaris se conclut sur l'idée que ses liens maintenus avec l'Abwehr avaient pu servir à désinformer les Alliés, non seulement par son intermédiaire, mais par celui de Gisevius. Ainsi, le 28 mars 41, ce dernier avait-il annoncé à son amie polonaise que les troupes de Rommel n'allaient en Libye que pour défendre le territoire encore aux mains de l'Axe... deux jours avant leur offensive ! Seule surnage, comme information utile et avérée, l'idée que les Allemands n'allaient pas attaquer dans les Balkans avant mars. Car on ne peut guère classer dans cette catégorie un enfoncement de porte ouverte comme l'annonce qu'ils renonçaient à débarquer en Angleterre, et encore moins ce qui concerne Barbarossa, annoncé pour ... début mai.
Là-dessus, Jeffery se laisse tromper de classique manière par la directive Barbarossa du 18/12/40 et sa mauvaise lecture pendant des décennies : on pensait qu'elle annonçait l'attaque pour le 15 mai alors qu'il ne s'agissait que de la fin des préparatifs les plus lourds (une erreur due elle-même à une intox hitlérienne, comme beaucoup : il avait prétendu, vers la fin de la guerre, que les bêtises de Mussolini, en l'obligeant à intervenir dans les Balkans, avaient retardé son attaque de l'URSS et l'avaient empêché d'obtenir la capitulation de ce pays avant l'hiver). Donc, lorsque la filière Canaris-Gisevius "informe" les Alliés que Barbarossa est pour début mai, la désinformation est patente, ainsi que son utilité : crier au loup à contretemps pour endormir la vigilance. |