Bonsoir,
Voici l'extrait d'un article publié sur le site de l'IHTP :
Le tournant stratégique
Depuis peu, nous savons que la veille de son retour en France, le 19 novembre 1944, Maurice Thorez a été reçu par Joseph Staline, qui a sommé la direction du parti français d'abandonner sa politique offensive contre le général de Gaulle, d'opérer un tournant et de prôner, au moins temporairement, l'apaisement. Selon le sténogramme de la rencontre, le dirigeant soviétique a déclaré que « les communistes n'ont pas encore compris que la situation a changé en France. Les communistes n'en tiennent aucun compte et continuent à suivre l'ancienne ligne alors que la situation a changé. [...] Entre temps la situation est différente, nouvelle, favorable à de Gaulle. La situation a changé et il faut opérer un tournant. Le PC n'est pas assez fort pour pouvoir frapper le gouvernement à la tête. »
Conformément à ces directives, le PCF opère un virage stratégique à 180° dont la composante militaire est éclairée par plusieurs documents des archives de Jean Pronteau. Ainsi, un rapport, non daté mais rédigé au tournant de l'année 1944-1945, témoigne des désillusions survenues chez les responsables communistes de la direction FFI devant l'effritement des positions conquises. Il témoigne aussi de l'ignorance dans laquelle sont tenus les cadres du parti de l'ampleur du revirement politique, ignorance que nous connaissons pour d'autres secteurs d'intervention, tel celui des milices patriotiques. Le rapport témoigne ainsi du premier désenchantement, mais aussi du maintien de la perspective initiale de la transformation de l'armée : « Rien n'est perdu tant que tout n'a pas été perdu, mais il faut faire vite, il faut adopter une ligne d'action précise, sortir des décrets, se fixer une doctrine, veiller sérieusement à l'exécution pratique des décisions de principe que la direction[13] a à charge de prendre. Au lieu de se noyer dans des problèmes de détail, il faut que les forces vives de la direction fassent un travail de création et d'inspection qui mette enfin en vigueur des réformes de structure sans lesquelles une armée populaire ne saurait se constituer. »
La tenue de la session d'Ivry du Comité central, à la fin du mois de janvier 1945, met un terme à cette situation ambiguë : la rectification politique n'est désormais plus seulement implicite, mais aussi explicite. Grâce à plusieurs documents émanant de la Commission de la Défense nationale de l'Assemblée consultative provisoire ou de la Commission militaire nationale du CNR[14], nous pouvons mesurer le décalage entre la nouvelle et l'ancienne politique. Ainsi, l'épuration de l'armée est désormais rejetée, la dissolution de la direction FFI est regrettée, mais dans des termes fort mesurés, etc.
En conclusion, il est nécessaire de souligner que les lignes qui précèdent ne résultent que d'une brève incursion au sein du fonds Pronteau. D'où le sentiment de frustration qui fut le mien, produit de la sensation de richesse confrontée à la pauvreté du temps disponible, encouragement supplémentaire à poursuivre les investigations et à effectuer, cette fois, une véritable et longue immersion.
L'article intégral :
Bien amicalement,
RC |