... et je suis avec intérêt les efforts de Cédric pour nous rappeler que les espaces privés sont soumis à des lois, tant générales que locales (leurs propres chartes, que le proprio ne peut transgresser à sa guise).
Cependant le droit n'est pas, et heureusement, un absolu, il doit toujours composer avec la dure pâte humaine. S'agissant d'Internet, celui qui placerait des querelles telles que la présente sur le terrain judiciaire ne s'attirerait que sarcasmes, tout d'abord de la part des juges, et des cris d'orfraie d'une grande majorité d'internautes, attachés au principe d'une régulation interne.
Elle nous surprendra toujours, la Toile, et c'est bien là son principal mérite. Que la discussion sur la modération d'un lieu s'installe sur un lieu voisin et qui plus est partenaire, voilà sans doute une figure inédite, et à coup sûr intéressante.
L'auteur des présentes lignes a laissé depuis l'été 2005 des tas de plumes sur des tas de forums pour avoir osé contester la version admise de la mort de Himmler. Mais derrière cela se profilait, qu'on le voulût ou non, qu'on le reconnût ou le cachât, un immense soulagement à l'idée que ses découvertes sur d'autres sujets comme le Haltbefehl, Montoire, le 18 juin, le statut des Juifs, les traîtrises de Halifax, les limites de Paxton, les ambiguïtés de Yamamoto, le fait que la nuit de Cristal n'était pas un pogrom et que le négationnisme commençât avec AJP Taylor etc. pussent enfin être déclarées fantaisistes, et que le ronron pût reprendre comme devant. Je ne m'en plains pas et je rassure les inquiets : elles ont repoussé, et c'étaient des plumes de mue, car la contestation même de très mauvaise foi aide toujours à mûrir (soi-même et ses analyses) quand on ne se laisse ni submerger ni aigrir par elle.
Censuré, oui, tant et plus, banni jamais si on excepte 15 jours par un surveillant surmené me renvoyant au coin avec mon contradicteur sans vouloir savoir qui était le transgresseur, je me souviens surtout d'un record indépassable : un contradicteur s'était auto-banni et les modérateurs me poursuivaient de leurs assiduités pour m'interdire de continuer à aborder des sujets sur lesquels il "ne pouvait plus défendre son point de vue". Les protagonistes de la querelle actuelle ont encore du pain sur la planche s'ils ambitionnent d'atteindre un tel sommet.
Autre souvenir pittoresque : un garçon avec lequel j'avais été d'une patience infinie sur mon propre forum et qui peu après, sur le sien, m'a défiguré un message en y gommant une phrase... ce qui m'a rendu particulièrement sensible à la mésaventure de l'ami Laroche.
Tout cela pour dire à ce dernier : pas de panique ! si c'est la censure que l'on combat, l'essentiel est donc qu'on s'exprime, et on y arrive toujours. Il n'y a pas de meute internautique sans fausse note dans les hurlements, et pas de bouchon hermétique : la parole trouve toujours une fissure. Tenus par des humains avec tout ce que cela suppose, les forums d'histoire ont tous force déconnades à leur palmarès, et pourtant ils tournent, et restent une magnifique machine à déroutiniser l'histoire...
... même si par définition on ne peut savoir ce qui se serait passé s'ils n'avaient pas été là, par exemple sur l'attitude du cabinet britannique à propos de Himmler : aurait-il sans l'attente des internautes lâché le 3 mai 2008 un dossier maladroit permettant de foncer pour élargir la brèche ?
L'amour propre, dit Martin Veyron, ne le reste jamais très longtemps. Ici je conclurai en disant qu'il se défroisse plus ou moins vite... mais en général assez vite, sur le forum incriminé. Il faudra bien en venir à une amnistie générale. Le mieux est, pour l'instant, de laisser retomber la pâte. |