J'approuve ce que vous dites mais vous vous faites quand même quelques illusions. Un héros flamboyant de la France Libre, le pilote de chasse René Mouchotte, mort au combat en août 1943, a écrit dans ses "carnets" personnels (publiés récemment après une édition... expurgée de 1949) que certains membres (pas rares!) de la faune (c'est moi qui choisis ce terme) gravitant autour du QG de De Gaulle à Londres recherchaient des postes et des honneurs... (bref, des arrivistes et des opportunistes). Ce spectacle l'avait dégoûté. Même la France Libre ne pouvait changer la nature humaine (française, anglaise, américaine, allemande, soviétique ou autre). Avec un peu d'intelligence, on pouvait même attendre jusque vers fin 1942 pour comprendre que l'Allemagne ne gagnerait pas la guerre. C'était évident depuis le 7 décembre 1941, l'Allemagne ayant follement attaqué l'URSS le 22 juin puis déclaré la guerre aux USA par le jeu de son alliance avec le Japon. Elle était en guerre contre tous les plus grands empires du monde sauf le Japon (un empire très local et très fragile) : les empires britannique, américain et soviétique! Dès décembre 1941, il était certain que l'Allemagne perdrait la guerre, quelles que pussent être les péripéties. "On" avait donc largement le temps de prendre le vent et... la bonne décision, largement à temps pour pouvoir se vanter d'avoir fait partie de la France Libre et d'avoir "rejoint de Gaulle à Londres".
Un détail : n'oublions pas que de très nombreux Français, p-ê un million et plus (?), se trouvaient ailleurs qu'en France en juin 1941, presque tous pour des raisons parfaitement légitimes, y compris comme soldats en Afrique du nord et ailleurs dans le monde entier. Certains sont restés aux USA, comme des acteurs et autres ; Jean Gabin, lui, a tenu absolument à s'engager dans la Marine (FNFL) et à se battre. Pierre Clostermann, le plus célèbre pilote de chasse français et l'un des tout premiers as alliés de toute la guerre, était en Californie, pays de rêve avec son soleil et ses jolies filles, où il venait d'obtenir son diplôme américain d'ingénieur en aéronautique (école Ryan) : il lui aurait été très facile d'y rester avec une parfaite bonne conscience puisque son travail aurait contribué à la production de dizaines de milliers d'avions de guerre modernes extrêmement utiles dans la guerre! Il est parti pour l'Angleterre fin 1940 afin de se battre contre l'Allemagne (il avait 19 ans ; je rappelle que l'âge de la majorité était alors à 21 ans). A l'époque, très peu d'aviateurs croyaient survivre à la guerre et, en effet, beaucoup sont morts sauf certains blessés, sauvés par leurs blessures, et les prisonniers (bien malgré eux). Des milliers de Français se trouvaient même... en Angleterre et, tout bien réfléchi, y rester plutôt que d'aller subir l'occupation, le danger et les privations en France n'était pas nécessairement héroïque (surtout si l'on avait plus de 45 ans)! Le meilleur ami et frère d'armes de P. Clostermann, Jacques Remlinger, avait toujours vécu en Angleterre avec ses parents (Français) et il aimait raconter que, pour se rallier à de Gaulle, il lui avait suffi de prendre le métro! Il a combattu héroïquement, comme pilote de chasse aussi, et il n'est mort qu'il y a quelques années, son grand ami Clostermann un peu plus récemment. D'autres, moins chanceux que Remlinger, avaient pris des risques inouïs et couru de très grands dangers rien que pour arriver en Angleterre.
Ce qui précède n'enlève rien au mérite ni à l'héroïsme des membres des FFL qui se sont battus, et dont beaucoup ne sont jamais revenus en France. |