Dans l'interview au Courrier (Genève), F. Gonseth dit des témoignages à la remarque du journaliste :
Difficile de reconstituer l'Histoire sur la base de tels témoignages...
- C'est pour cette raison que le travail historique se nourrit de documents écrits. Mais c'est insuffisant de ne pas prendre en compte la mémoire émotionnelle, tant au niveau individuel que collectif, et de ne se baser que sur des archives comme le fait la Commission Bergier. Les témoins se sentent alors floués, négligés et ne peuvent adhérer au travail effectué. Ces émotions refoulées se transmettent de génération en génération. Si le peuple suisse refuse encore d'entrer dans l'Europe, c'est en partie parce qu'il n'y a pas eu, jusqu'à l'affaire des fonds en déshérence, de réel retour critique sur notre passé. Et aussi parce qu'il n'a pas l'impression d'avoir été reconnu et entendu depuis la Seconde Guerre mondiale alors qu'il a mieux résisté que les autorités aux compromis exigés par l'Allemagne. Quand une situation similaire se reproduit – une intégration à une communauté étrangère soutenue par la Confédération –, il la refuse, car il est encore animé par la peur d'antan.
RC
PS : Faire parler les témoins et acteurs (victimes et bourreaux) fut au cœur du travail de C. Lanzmann pour Shoah. |