La génération de 40, pour ne parler que d'elle a eu de nombreux modèles de société à adopter, si elle refusait désormais la 3e République, et la démocratie à la française.
Cette génération engagée qui ressentit brutalement le traumatisme de mai-juin 40 - dont elle était en partie responsable - et l'effondrement général qui suivit, avait vécu toutes les crises politiques, économique, morales et culturelles qui marquèrent les années 20 et 30. Cet entre-deux-guerres fut aussi le temps des alliances les plus improbables. J'avais trouvé il y a quelques années la réédition du journal à quatre mains rédigé par Emmanuel Berl et Pierre Drieu La Rochelle à la fin des années 20, Les Derniers jours, positionné "entre Moscou et Genève" (ou "Ni Genève, ni Moscou", à vérifier.) : Genève car c'était la grande époque de la SDN qui devait empêcher tout conflit de dégénérer en nouvel embrasement mondial et Moscou, car ce fut aussi le temps de l'espoir ou de la crainte, selon ses engagements idéologiques, de la révolution soviétique.
La présentation de l'éditeur :
C’est en 1926 qu’Emmanuel Berl comprend que "tout est foutu". Il crée alors, avec son ami Drieu la Rochelle un petit journal qui rend compte de cette angoisse devant "la misérable condition spirituelle de l’Europe". Un "petit cahier d’observation résumée et d’ultime débat", cahier politique et littéraire qui mène une importante réflexion sur la possible révolution communiste, le rôle de la bourgeoisie et du catholicisme. Berl, qui affirme que la politique ne peut plus être pensée que sous la seule catégorie de la révolution se révèlera extrêmement lucide sur le “progrès” du monde occidental. Il écrira des années plus tard : "Jusqu’à la bombe d’Hiroshima, il fallait, non seulement un esprit anormalement pessimiste, pour se demander : “L’homme fait-il ou subit-il cette révolution ? il croit l’avoir déclenchée ; est-il capable de l’arrêter, même de la ralentir ?”, j’ai posé la question dans Les Derniers Jours en 1930 : elle n’a guère éveillé ni l’attention ni l’intérêt. Aujourd’hui seulement, l’angoisse s’est répandue, la mutation cessera-t-elle dès qu’elle s’avèrera maléfique ? L’homme ne devra-t-il pas subir, fût-ce malgré soi, ses automobiles – comme le paon son plumage ou le cerf la démesure de ses bois."
Cordialement,
RC |