Bonsoir,
Merci de votre réponse.
A propos de ces 22 mois en Pologne, de Gaulle écrit à ses parents : "L'armée de Pologne aura été - ce que je la destinais à être - une restauration militaire. Cette restauration est dans la meilleure voie."
(cité par Eric Roussel dans sa bio de de Gaulle parue chez Gallimard en 2002.)
A croire que le capitaine a pu se sentir comme anesthésié par sa captivité en Allemagne de fin février 1916 à novembre 1918.
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De façon plus générale je me dis que des jeunes officiers français issus (rescapés) de la guerre la plus terrible que le monde ait alors connue et qui furent plongés presque sans période de repos, sans break, dans le grand brassage d'idéologies des années 1919-22 ont du en être marqués lorsqu’ils s’engagèrent pour former les futurs cadres de la nouvelle armée polonaise.
C’est le temps violent et pour certains exaltant où le communisme réel s'installe à l'Est dans la brutalité d'une guerre civile qui va prendre la forme de ce qu'il faut bien appeler une première tentative impérialiste contre la toute jeune Pologne reconstruite. C’est aussi le temps où des empires implosent et sont démembrés, où l'Allemagne et la Hongrie sont traversées de violentes secousses révolutionnaires pour ne pas parler des discours pacifistes et des bouleversements culturels qui bousculent la vieille Europe traumatisée par le grand massacre de 14-18. (Keegan écrit que l'Europe ne s'en est jamais remise complètement, son humanisme propre ayant été anéanti sur la Marne et à Verdun.) Ces jeunes officiers auraient pu être influencés par des idées nouvelles, par l’irruption de théories qui avaient pour but de changer le monde en profondeur, fut-ce par une violence révolutionnaire implacable,et pourtant à lire les lettres et notes de de Gaulle, il est resté très nationaliste. Il écrit même qu'il se sent "débordant d'une xénophobie générale" (!) (cité par Roussel.)
Je voulais savoir si des officiers de cette génération avaient été transformés par leur contact avec les mouvements et les idées de cette Europe en ébulition au point de rejoindre des groupes ou des partis révolutionnaires durant les années 20 et 30. C'est une question un peu vaste et vague, j'en suis conscient, mais est-ce que les archives de l'armée possèdent des dossiers sur des cas de "subversion" relevés parmi ceux qui revinrent de l'Est après les activités de conseillers en Pologne, par exemple ?
Cordialement,
René Claude |