Le journal de Goebbels du mardi 13 mai 1941
..........
Le soir arrive une nouvelle effroyable : en dépit de l’ordre du Fürher, Hess est parti en avion et il est porté manquant depuis samedi. On est forcé de compter avec son décès.
Ses aides de camp, les seuls à avoir été au courant, ont été arrêtés sur ordre du Führer. Dans le communiqué du Führer, on évoque comme motif des hallucinations liées à d'illusoires sondages de paix. Le tout est pour l'instant encore très confus. Nous devons publier le communiqué immédiatement. Un rude coup, presque insupportable. Pour l'heure, il est encore impossible d'avoir une vision d'ensemble de cette affaire. On m'appelle depuis le Berghof (il y a confusion de dates avec ce que dit Rochus Misch)
Le Führer est totalement effondré. Quel spectacle donnons-nous au monde : un déséquilibré, bras droit du Führer ! Abominable et impensable. Maintenant, il faut serrer les dents.
Hess a joué avec l'idée de la possibilité d'une paix. Il était sans doute trop coupé du combat quotidien et il a maintenant flanché. Cette affaire va nous donner beaucoup de fil à retordre. Je commence sans délai, en faisant couper dans les dernières "Actualités hebdomadaires" les images où il apparaît. Reuter publie encore un communiqué très paisible. Mais la tempête va se lever dans les heures qui viennent. Je suis assailli de coups de téléphone : Gauleiter, Reichsleiter, etc. Aucun d'entre eux ne veut même croire à cette aberration. Cela semble effectivement tellement absurde qu'on pourrait croire à une mystification.
Je dois me rendre à l'Obersalzberg. Là-bas, j'en apprendrai sans doute plus. On ne peut rien dire au téléphone.
.............
16 mai 1941 (vendredi).
Hier : l'affaire Hess est toujours au premier plan, mais perd peu à peu de son caractère sensationnel.
Londres ne saisit manifestement pas l'occasion de la combine, pourtant évidente, consistant à publier simplement, sans égard pour Hess, des déclarations en son nom. Ce serait pour nous l'unique danger, mais il serait effroyable. Je tremble à l'idée que cela puisse se produire.
...........
Le peuple plaint le Führer. C'est déjà une grande nouvelle positive. L'affaire est encore loin d'être terminée, mais elle a au moins perdu une bonne partie de son caractère dangereux et dramatique. Les rumeurs s'apaisent. Partout, une sorte d'ambiance de gueule de bois. Je bloque toutes les informations pour l'Allemagne et, à l'égard de l'étranger, je laisse parler les faits. Cette tactique se révèle être la bonne.
Je publie un décret rigoureux contre l'occultisme, la voyance, etc. Cette obscure fumisterie va être maintenant définitivement déracinée. Les faiseurs de miracles, les chouchous de Hess, seront mis derrière les barreaux. Instruction est donnée aux Gaue d'informer le Parti de la situation. Cela consolidera au moins un peu le sol sous nos pieds |