Bonsoir/Bonjour,
Pour revenir sur le film de Berri tiré des mémoires de Lucie Aubrac, j'ai les mêmes réserves que pour le "Moulin" de Franck et Boisset : le réalisateur est obligé de réduire et de compresser 3 années intenses de la vie de personnages devenus des mythes (c'est un autre débat) pour en tirer un film de 120 min env. En plus, il faut que le produit séduise le grand public en salle ou à la télé...! Selon moi, c'est un pari impossible à tenir. Là dessus viennent se greffer les questions légitimes que ne manqueront pas de soulever les historiens et les journalistes informés (il en reste !). Dans les deux films, les scénaristes ont avoué avoir fait subir quelques torsions à la vérité historique. Mais alors pourquoi ne pas avoir opté pour des personnages complètement fictifs dans le cadre des années noires ? Les réflexions sur le sacrifice, la trahison et l'engagement auraient tout aussi bien pu être illustrées avec des personnages inventés.L'exemple qui me vient est encore "l'Armée de Ombres" de Melville.Les chercheurs et tous ceux qui essaient de suivre l'actualité éditoriale sur l'année 43 de la Résistance ont bien le droit de réagir à la vision de certaines scènes inventées que le réalisateur colle tant bien que mal sur une trame véridique... Le procédé est selon moi un peu douteux. Voir par exemple un Auteuil/Aubrac faire sauter un train de la Wehrmacht dans les premiers plans du film de Berri a de quoi laisser dubitatif quant au sérieux de l'entreprise...! Je crois que même René Hardy durant ses mois dans la résistance-fer n'a pas exécuté en personne des actions de ce type.
Il faut l'avouer, les noms de Moulin et des Aubrac attirent les producteurs qui acceptent de monter un financement sur leur popularité au détriment de la rigueur historique.
Je suis persuadé qu'un bon documentaire critique reste encore le meilleur support pour espérer toucher le plus grand nombre de (télé)spectateurs.
Amicalement,
René Claude |