> Il a laissé faire Roncalli, et Tiso, et Saliège et Mayol
> de
> Luppé, et qui d'autre encore?
Pie XII n'a pas soutenu Tiso. Le Vatican a protesté contre la législation antisémites, demandé à suspendre les persécutions et la déportation. Le gouvernement slovaque a louvoyé, tantôt gardant le silence, tantôt suivant les recommandations du Saint-Siège. De sorte que les déportations ont été suspendues jusqu'à ce que les Allemands prennent le contrôle total du pays en 1944 - voir Pierre Blet, Pie XII et la Seconde Guerre Mondiale d'après les archives du Vatican, Perrin, 1997, p. 192-203.
Quant à Mayol de Luppé, l'aumônier de la L.V.F., il agissait seul, sans le moindre soutien du Saint-Siège.
Enfin, faire de Pie XII un antisémite viscéral est une contre-vérité manifeste. Pie XII n'a pas soutenu les nazis, bien au contraire.
Pour vous faire votre propre opinion, je vous renverrai aux ouvrages suivants.
La pièce Le vicaire (que l'on ne peut du tout prendre pour argent comptant en ce qui concerne ses griefs à l'encontre de l'Eglise, même si c'est bien écrit, du moins bien traduit - avis perso) est toujours disponible, aux éditions Seuil. Elle a fait l'objet d'un commentaire historique critique remarquable : Jacques Nobécourt, Le Vicaire et l'Histoire, Seuil, 1964. Pour se faire une idée des résultats de la recherche historique et de l'ardente controverse qui divise encore et toujours (ce pour un bout de temps) les historiens, l'on se reportera à Marc-André Charguéraud (Hitler, les papes et la Shoah, Labor et Fidès, 2002) et Jose Sanchez (Pius XII and the Holocaust. Understanding the controversy, Catholic University of America Press, 2002), tous deux excellents, et surtout Philippe Chenaux, premier auteur d'une biographie scientifique du Pape, Pie XII, diplomate et pasteur, Cerf, 2003, ainsi que Giovanni Miccoli, Les dilemmes et les silences de Pie XII, Complexe, 2005, excellente étude d'ensemble du contexte et des limites de la politique papale face aux totalitarismes. Ne pas oublier non plus Yves Chiron, Pie XI, Perrin, 2004.
L'on ne présente plus le livre de John Cornwell, Le pape et Hitler (Albin Michel, 1999), pseudo-travail historique, de parti pris évident, et dont à la fois le contenu et la méthode ont été démantelés par Ronald Rychlak, Hitler, the war and the Pope, Our Sunday Visitor, 2000 - défaut : trop hagiographique. L'ouvrage de Saul Friedländer, Pie XII et le IIIe Reich, Seuil, 1964, est dépassé mais expose la documentation allemande accessible, traduite en français. Fort critique à l'égard de Pie XII, Carlo Falconi (Le silence de Pie XII, éd. du Rocher, 1965) expose les compromissions de l'Eglise catholique en Croatie et publie à cet effet un nombre considérable de documents relatifs aux réactions catholiques en Pologne et en Yougoslavie sous occupation axiste. Pierre Blet, jésuite membre de l'équipe chargée de la publication, dès 1965, des Actes et documents du Saint-Siège relatifs à la Seconde Guerre Mondiale, a essayé, avec plus ou moins de bonheur, de défendre de son mieux le Pape, in Pie XII et la Seconde Guerre Mondiale d'après les archives du Vatican, Perrin, 1997, mais ne convainc pas toujours. Michael Phayer, dans L'Eglise et les nazis (Liana Lévi, 2001), parvient à adopter une attitude distante à l'égard de la controverse, mais ne saurait toujours convaincre par ses critiques formulées à l'encontre du Vatican, même s'il prend soin de rappeler que ce dernier est davantage intervenu qu'on ne le pense généralement. Phayer réhabilite d'ailleurs Mgr Stepinac, primat de Yougoslavie et archevêque de Zagreb, accusé d'avoir appuyé sans réserve le régime fasciste croate des Oustachi. L'historien israélien P.E. Lapide essaie de réhabiliter Pie XII dans Rome et les Juifs (ouvrage global sur les relations christiannisme/judaïsme, Seuil, 1967), mais esquive les véritables questions.
Sur les actions du Vatican à l'égard des juifs d'Italie, voir l'indispensable Under His Very Windows, de Susan Zucotti, Yale Nota Bene (2002) : Zuccotti se montre fort sévère à l'encontre de Pie XII, mais apporte des éclaircissements intéressants sur les persécutions/déportations des juifs d'Italie ainsi que le rôle joué par les catholiques. Enfin, sur le Vatican, Annie Lacroix-Riz (Le Vatican, l'Europe et le Reich : de la première guerre mondiale à la guerre froide, Colin, 1996) se laisse entraîner assez souvent par sa traditionnelle hostilité à Pie XII, ce qui lui fait soutenir des affirmations hautement contestables.
A lire également : Günter Lewy, L'Eglise catholique et l'Allemagne nazie, Stock, 1964, excellent ouvrage (toujours considéré comme une source fiable) relatif aux rapports entretenus entre l'épiscopat allemand et le régime hitlérien de 1933 à 1945. J.S. Conway, de son côté, met l'accent sur l'athéisme persécuteur des nazis dans La persécution nazie des Eglises, France-Empire, 1969. Xavier de Montclos, dans Les Chrétiens entre stalinisme et nazisme, Complexe, 1991, opère une bonne description du comportement des catholiques au cours des années noires. Le cas français a fait l'objet d'une étude de fond, qui restitue excellement les ambiguités et dérives du monde catholique de la période : Eglises et chrétiens dans la IIe Guerre Mondiale, Actes du colloque de Lyon 1978, P.U. de Lyon, 1982. |