Vous devez confondre Carl Lutz avec Paul Grüninger. Ce dernier, le commandant de la police du canton de Saint-Gall fut à la tête d'un réseau de passage en Suisse. 3000 réfugiés (env.) ont été sauvés par les membres de ce réseau. Cela s'est déroulé avant septembre 1939. Cette même année, Paul Grüninger fut démis de ses fonctions par le Dpt fédéral de justice et police.
L'historien Stefan Keller a consacré un essai à ce citoyen helvétique remarquable qui s'est engagé pour des raisons humanitaire. Il avait compris très tôt la réalité de l'Etat nazi. Il ne fut réhabilité qu'en 1993, et encore, seulement sur le plan politique...
Un de ces Suisses dont l'engagement avant ou pendant la WW2 fut officiellement condamné par l'Etat puis ignoré par la mémoire nationale durant un demi-siècle. Des centaines d'autres subirent un sort semblable. Ce n'est que depuis 15 ans que des groupes de pression tentent de faire reconnaître leur combat en pays "neutre". Ils et elles ne sont pas tous réhabilités. Un autre scandale.
Réf.
Stefan Keller, Délit d’humanité. L’affaire Grüninger Traduit de l’allemand par Ursula Gaillard. Préface de Ruth Dreifuss. 224 p. Editions d'En-bas, 1994.
Carl Lutz, lui, fut convoqué devant un juge en 1945 de retour de Hongrie où il avait pris des risques considérables. Motif : le gouvernement avait lancé une enquête administrative sur l'ambassade suisse à Budapest. Pourquoi Carl Lutz s'était-il mêlé d'une affaire intérieure hongroise en sauvant des juifs ? On croit rêver à l'énoncé du motif de l'enquête, mais non ! Heureusement pour Lutz et le personnel de son ambassade, ce juge était un homme avisé et juste. Il reconnut que l'engagement des gens de l'ambassadeur sauva la vie de milliers de juifs hongrois. Ce magistrat blâma même le gouvernement suisse d'avoir lancé une enquête qu'il jugeait insultante pour les personnes visées. (in Diplomatie dangereuse de Theo Tschuy.)
Carl Lutz ne fut pas sanctionné par le gouvernement.
Quand je parlais de la nécessité de nuancer. Voilà un exemple à travers ce juge qui refuse de suivre l'Etat confédéral au sortir du conflit.
RC |