Bonsoir,
En fait, le projet allié de débarquement en Afrique du Nord avait transpiré au point que tout le monde, de Hitler à Pétain et de Murphy à de Gaulle était informé de l'opération. Comme l'écrit Anne Laurens, les gens dans le secret en parlèrent à un ou deux très bons amis qui eux-mêmes le racontèrent à deux ou trois fidèles qui, etc...
Si la date exacte n'était connue que d'un petit noyau, dans le camp allié comme dans le camp ennemi, le débarquement ne fut pas une surprise.
Roosevelt, méprisant, a beau conseiller par écrit le 5 novembre - un conseil qui est quasiment un ordre - à Churchill ne de donner à de Gaulle "aucun renseignement sur "Torch" tant que le débarquement ne sera pas un fait accompli", tous les services de renseignement sont déjà au courant des plans alliés pour l'Afrique du Nord.
Un état-major combiné américain était arrivé en Angleterre, les îles Britanniques étaient parcourues de convois d'hommes et de matériel et, ainsi que l'écrit Anne Laurens "une vive animation s'était mise à régner à Norfolk House, en cet automne 1942, car c'était là qu'Eisenhower avait pris sièges. Des rapports constants s'étaient établis entre ses officiers, passablement ignorants des choses d'Afrique, et les Français libres." (p.157, "Les rivaux de Charles de Gaulle")
Et de nous rapporter une anecdote :
"Un officier américain avait pénétré dans un club largement fréquenté par les armées alliées, en criant à l'attention d'un ami :
- Dites donc, mon vieux, y a-t-il au moins un hôtel convenable à Alger ?"...
C'est en octobre (1942) que Charles de Gaulle rentre à Londres après son long périple au Moyen-Orient et en Afrique dans les territoires ralliés à la France combattante : il ne peut pas ne pas avoir été immédiatement informé de "Torch".
Concernant les premiers rapports entre Eisenhower et le Connétable, il faudrait peut-être (re)lire les pages du commandant en chef en afin de savoir s'il mentionne ses contacts, mais il est certain que les deux hommes se sont croisés et ont sympathisé à Londres dans les semaines qui précédèrent le débarquement en Afrique du Nord.
Anne Laurens affirme que De Gaulle et Eisenhower se sont rencontrés quand l'état-major américain s'est déplacé à Londres pour préparer "Torch".
Il semble, si je me fie à sa note concernant la bienveillance d'Eisenhower à l'égard de de Gaulle qu'Antony Eden ait lui aussi fait mention de contacts positifs Eisenhower/de Gaulle dans "Mémoires : 1939-1945" (Cassel éd.).
Cordialement,
René Claude |