Bonjour, bonsoir,
Ayant repris l'enquête de Chauvy "Aubrac, Lyon 1943" avec une attention que je souhaite constante, je suis aussi exaspéré que vous après 200 pages de relecture par l'aspect brouillon du texte. Néanmoins, certains des éléments analysés par Chauvy - notamment les rapports des différents chefs du SD (Kaltenbrunner, Flora,etc.) - ne doivent pas être liquidés en quelques lignes scandalisées comme ce fut le cas à la sortie de ce livre qui, je le répète, mérite d'être intégré, avec les réserves déjà énoncées, à la bibliographie sur la Résistance, car, comme vous l'écrivez :
"Gérard Chauvy a fait un bon travail de recherche et a su mettre en exergue toutes les contradictions dans les divers témoignages du "couple infernal". Malheureusement, il n’a pas su exploiter la matière qu’il avait en sa possession et a gâché son travail par la mise en avant du "testament" de Barbie, document qui ne tient bien évidemment pas la route. Même s’il prend toutes les précautions nécessaires vis-à-vis du texte en question, l’historien lyonnais y revient trop souvent pour demeurer crédible. De plus, son ouvrage pêche par manque de clarté dans ses conclusions. Il insinue (c’est d’ailleurs pour cela qu’il a été condamné) mais n’affirme rien de précis et laisse indéniablement le lecteur sur sa faim."
Par exemple, ce que Chauvy développe concernant les agents et les traîtres Moog, Multon, Steingritt, et Delétraz tient tout-à-fait la route lorsque compare avec les compte-rendus d'autres chercheurs (Péan, Cordier, Azéma, etc) . A mon stade de relecture, sur ces acteurs du drame, je n'ai pas relevé d'erreurs majeures chez Chauvy; il faut reconnaître qu'il maîtrise bien son sujet. Ses attaques et insinuations sans preuve contre les Aubrac ne doivent pas nous faire écarter ce que son livre peut apporter d'éléments pertinents à une compréhension globale et politique de Caluire.
Il y a un élément sur lequel Chauvy revient et insiste, selon moi avec raison, c'est les ravages causés par les saisies successives de documents et d'archives conservés par les responsables de mouvements et de réseaux (arrêtés ou en fuite) durant les mois qui prècèdent juin 1943. On oublie souvent que le boulot de flic nazi durant l'Occupation est surtout un boulot de lecteur qui sait recouper les pièces entre elles et avec les déclarations des résistants interrogés, intimidés et torturés. Un flic politique sait aussi tirer parti des explications volontairement embrouillées et incomplètes des patriotes qu'il a en face de lui.
A plusieurs reprises dans leurs déclarations après la guerre, des résistants dirent leur effarement en découvrant ce que le SD/Gestapo et l'Abwehr savaient déjà de leurs activités et des organigrammes des mouvements : noms, pseudos, etc.
A suivre...
Bien cordialement,
René Claude |