tout d'abord une confirmation : Höhne parle du voisinage pavillonnaire en passant. il est même très bon public quand Lina Heydrich dans un entretien de 1975, donc avant ses mémoires, lui dit avoir appris, quand Heydrich et Canaris se sont rencontrés une première fois "par hasard" dans la rue en 1935, que c'est comme cela (sic) que le n° 2 des SS a appris la promotion d'un vieil ami à la tête de l'Abwehr !!!
Cette cécité de biographe ne prouve rien de même, ai-je coutume d'écrire, que toutes les erreurs écrites après coup ne changent rien à la réalité historique. Cependant elle a une signification : elle nous instruit sur la structuration de l'esprit de la plupart des gens qui écrivent sur le nazisme avant, disons, les années 1990. Ils s'imaginent le SD et l'Abwehr comme des bureaucraties rivales et ne voient littéralement pas les passerelles.
Mon post précédent est largement spéculatif mais il ne faudrait pas le négliger pour autant : il ne fait que répondre à l'objection de Nicolas suivant laquelle, si Canaris avait été un homme de Hitler, celui-ci l'aurait mieux protégé. Or il était un homme de Hitler, comme Kerjean l'a démontré et risque, avec sa prochaine thèse, de le démontrer de plus en plus. Il faut donc trouver une logique, et j'en ai proposé une.
J'avais déjà eu l'occasion de le dire ici, dans une discussion avec Olivier Pigoreau : pour que la trahison de Canaris soit admise comme un fait historique, il faudrait pouvoir lui assigner un début. Début 1938, disait mon interlocuteur. Alors là non, impossible, avais-je répondu. Un régime aussi divisé par le sommet ne conquiert pas deux ans plus tard la moitié de l'Europe. Donc, si Canaris n'est pas traître envers Hitler en 1938, il l'est envers les traîtres, car il y a quand même dans le lot quelques vrais conspirateurs (dont déjà, sans doute, Oster).
C'est donc la fin de la collaboration Canaris-Hitler qui serait à dater, plutôt que le début de sa trahison. |