... c'est toujours cet étonnement qui m'étonne.
Ce qui fait le bourreau ordinaire c'est ce qu'on arrive à lui fourrer dans le crâne de "normes" et non une tronche particulière, une inaptitude à sourire ou une paire de cornes fournie gratuitement par Bélzébuth en personne. Lorsqu'un pilote de bombardier ouvre sa soute, il ne songe pas une minute aux enfants qu'il va tuer. Il fait un "job" qu'on lui a présenté comme nécessaire et juste. Lorsqu'un chef d'état déclenche une guerre, il pense statistiques mais ne subit en aucun cas le fouet de la douleur de chaque vie qui va être perdue à son initiative.
Lorsqu'un SS "moyen" participe d'un processus d'extermination de masse, c'est le même principe qui s'applique, simplement monstrueusement démultiplié et rappellant furieusement l'endoctrinement sectaire qui touche si souvent les gens "normaux". Lui voit les victimes mais fait son "job" parce que c'est "normal" et que celles-ci sont ramenées à une dimension insectoide voire bactérienne. Il n'a plus d'hommes et de femmes en face de lui mais un groupe de parasites, un ennemi, une menace mortelle qu'il est naturel d'éliminer. Il n'aura d'ailleurs jamais de vision "globale" des choses et ne verra que sa tâche quotidienne plus ou moins "ingrate" et, selon les individus et les situations, la servira avec plus ou moins de zèle et de sadisme ou au contraire de froid détachement. Dans l'univers mental créé par les nazis, tout: éducation, propagande, jusqu'à l'organisation pratique du génocide est fait pour lui ôter le moindre sentiment de culpabilité, à banaliser le meurtre qui n'est plus alors qu'un "travail" effectué pour le bien commun et dont il n'est qu'un minuscule rouage.
Impensable pensera tout être humain normalement constitué ! Malheureusement de telles processus sont plus ou moins en germes partout chez les gens les plus ordinaires. "Les" Noirs sont... "Les" Blancs font... "les" Musulmans, "les" Bosniaques, "les" Arméniens, "les" Tustis, "les" Juifs, "les" Américains, "les" Palestiniens... voilà déjà l'individu aggloméré à un tout dont il n'est pas responsable et qui, devenu un jour objet d'une haine organisée et "normalisée", serait susceptible de faire de lui la victime ordinaire d'un quelconque bourreau aussi ordinaire que lui. |