Marie 1ér, roi des Sedangs - Marie 1° roi des Sedangs - forum "Livres de guerre"
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Marie 1° roi des Sedangs / Maurice Soulié

En réponse à
-1Philatéliquement parlant de Laurent Boussaton

Marie 1ér, roi des Sedangs de Serge Desbois le dimanche 09 septembre 2007 à 10h45

Laissons parler Philippe Franchini qui a tenu l’Hotel Continental de Saïgon jusqu’à la débandade de 1975 :

On était en 1888. A l'heure de la sieste, la terrasse de l’Hôtel Continental était vide, la rue Catinat déserte. Cernée par l'étau. de la chaleur tropicale, la ville dormait, figée dans l'immobilité du silence. Mr Laval, le directeur de l'hôtel, avait rejoint ses appartements. Sûrs de leur tranquillité, le secrétaire s'était affalé sur ses grands livres de comptes, le concierge somnolait sur sa chaise. Qui eût osé les déranger à cette heure ? Ils entendirent bien la calèche passer rue Catinat mais n'y prêtèrent que peu d'attention. Sans doute ses occupants avaient-ils été retardés par quelque déjeuner en ville. Aussi peut-on imaginer l'affolement que déclencha chez eux l'apparition soudaine des personnages qui se présentèrent quelques instants plus tard devant eux : deux hommes blancs, vêtus l'un d'une tunique bleue à brandebourgs, les hanches sillonnées de galons d'or, le pantalon blanc serré par une large ceinture rouge, une épée sur le flanc, l'autre d'un uniforme rouge comme on en voyait aux officiers anglais.
Ils étaient suivis de quelques Mois, aborigènes des hauts plateaux, presque complètement nus.
— Faites venir M. Laval, ordonna le personnage en bleu d'un ton sans réplique.
— Lui faire sieste, pas content réveillé.
— Je vous dis de le réveiller ! fit l'inconnu en roulant les yeux. Faites-lui savoir que sa Majesté Marie Ier, roi des Sedangs, est ici et veut des appartements pour lui et sa suite.
Effrayé et impressionné, le concierge rassembla son courage et courut réveiller Laval.
— Messieu Patron, y en a roi Cambodge en bas vouloir chambre.
— Qu'est-ce que tu dis ? Le roi du Cambodge ici ? Sans prévenir ?
— Lui y en a beaucoup joli costume, quan lung, grand mandarin.

Flatté que son hôtel, qui à l'époque n'était encore qu'un petit établissement, fût honoré d'une visite royale, Laval se précipita à la rencontre de l'hôte prestigieux. Mais quelle ne fut pas sa stupéfaction quand, dans le roi du Cambodge, il reconnut ce fumiste de Mayréna dont on disait qu'il était parti à la conquête des hauts plateaux sur les ordres du gouverneur général Constans.
— Vous êtes en présence de S.M. Marie Ier, roi des Sédangs ! annonça Mayréna un sourire aux lèvres.
Laval eut la bonne grâce d'accepter la plaisanterie : il fit servir le roi des Sedangs et sa suite.
Il rit cependant moins quelques jours plus tard quand Mayréna lui demanda de lui ouvrir un compte pour ses dépenses et de lui octroyer d'éventuelles avances de caisse. Mais après tout, les clients n'étaient pas légion; on devait trop souvent attendre l'arrivée des bateaux, et les militaires et les fonctionnaires n'étaient pas riches; surtout, on pouvait espérer que le gouvernement général subventionnait Mayréna. Laval obtempéra.
Hélas, quand quelques jours plus tard Mayréna quitta l'hôtel, il ne restait à Laval pour prix de ses services qu'une décoration, celle de l'Ordre national du royaume des Sedangs, que le roi en grande cérémonie lui avait décerné au moment de son départ. L'argent, il valait mieux ne plus y penser.

Qui était Mayréna ? Un aventurier, un fou, un fabulateur, un
héros chimérique, un explorateur raté ? Malraux, qui' s'en est inspiré dans La Voie royale l'évoque ainsi dans ses Antimémoires : Mayréna, c'est l'ennui de la Cochinchine, les casques coloniaux, l'heure verte à la terrasse du Continental quand le bref soir tombait sur les caroubiers, sur les victorias qui se croisaient rue Catinat dans le bruit de leurs grelots et l'extinction des feux dans les casernes des tirailleurs sénégalais...

Un jour, le gouverneur général Constans convoqua Mayréna, non pas pour le réprimander sur l'une de ses incartades ou l'un de ses trafics, mais pour lui parler de son article sur les Hauts Plateaux, ce pays de l'Hinterland. Les Allemands s'apprêtaient, avec l'aide des Siamois, les ennemis irréductibles des Mois, à envoyer une mission vers Attopeu; il fallait les devancer , éviter de voir une nouvelle puissance menacer de couper la péninsule en deux.

Constans demandait à Mayréna d'y partir pour essayer d'y installer un protectorat français. La mission était officieuse, mais l'ancien spahi accepta d'enthousiasme, à la condition qu'on lui accordât comme récompense en cas de succès :la concession des mines d'or d'Attopeu et l'honneur d'être le chef de la Confédération des Mois.

L'aventure était engagée. On était en 1888, et depuis 1884, le protectorat de la France avait été définitivement établi sur l'Annam et le Tonkin. Paul Bert avait réalisé en 1887 l'Union indochinoise, comprenant la colonie de Cochinchine, les protectorats du Cambodge, de l'Annam et du Tonkin, réunis sous le gouvernement général de l'Indochine.

Mayréna allait compléter sa réussite de chercheur d'or par la gloire nationale d'ajouter un territoire à l'empire français !

Un jour, il arrivèrent dans une forêt clairière. Mais alors qu'ils pensaient y trouver les missionnaires, ils furent attaqués par une bande de pirates. Enfin, pensa Mayréna, quelque chose de palpable, de saisissable ! Et, malgré la lassitude, la fièvre qui lui serrait les membres et la tête, son acharnement fit fuir les bandits en quelques minutes.
Afin de se protéger des menaces des odieux Siamois, les chefs de tribus acceptaient non seulement de faire la paix entre eux, mais de passer sous protectorat français et de s'unir en une confédération Moï, dont Mayréna serait le chef constitutionnel.

Mayréna s'était imposé avec superbe, grâce à sa prodigieuse habileté aux armes et à son astuce. Après avoir combattu au sabre le chef des Sedangs, et aussitôt pris sa place sur le trône, il avait entrepris de vaincre tous les valeureux guerriers qui le défiaient. Grâce à la cotte de mailles qu'il avait au préalable cachée sous son dolman il s'était soumis avec succès à l'épreuve des flèches empoisonnées et à celle de balles tirées à bout portant par Mercurol : des boulettes de coton remplaçaient le plomb ! « Les génies de l'Occident qui me protègent sont invincibles, je suis votre chef ! ».

En fait, les Allemands et les Siamois avaient dû rebrousser chemin, décimés par les fièvres et les maladies.

Malheureusement, pour les glorieux vainqueurs, les six mille francs alloués par le gouverneur général avaient fondu, et les caisses du nouvel Etat étaient vides….

Ne restait plus au roi qu'à repartir pour Saigon, demander à Constans son aide. Mais Constans était rentré en France, pour devenir président du Conseil. L'Eldorado politique lui avait paru plus accessible que celui de l'Hinterland et son successeur Richaud n'appréciait guère les mascarades de Marie Ier. L'Hinterland était passé de mode. Le malheureux Mayréna fut contraint à l'exil…

Entre Félix Faure, le président Constans ou même le général Boulanger, dont on ne sait au juste s'il les a rencontrés ou non, et de folles soirées dans les bals montmartrois, il continuait à accumuler dettes et remises de décorations. Qu'auraient pu contre sa déchéance, les fleurs qu'au Moulin Rouge lui envoyaient les danseuses ?

Et Constans ne plaisantait plus du tout. Un beau matin, il finit par déposséder le prince de son royaume, lui interdisant le territoire de l'Indochine pour haute trahison !

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