> Le général en retraite Hans Speidel, qui fut chef d'état-
> major de Rommel entre avril et juillet 1944, devait être
> un invité allemand fréquentable sur le plateau
> des "Dossiers de l'écran" pour débattre des questions
> militaires du Débarquement ou de la bataille de
> Normandie. Je n'ai pas le souvenir d'avoir suivi au
> cours des années de diffusion de cette émission-culte
> une discussion sur le rôle politique de la Wehrmacht
> dans le régime nazi et sur sa participation aux crimes
> de guerre. C'était le temps où l'on opposait les
> officiers traditionnalistes durs-mais-corrects de
> l'armée allemande aux SS. Mais c'est un autre débat.
Fréquentable, Speidel l'était, au point que l'extrême droite allemande lui en tiendra bien évidemment rigueur - les survivants de la conjuration du 20 juillet seront extrêmement mal perçus en Allemagne fédérale... Quoique ayant fait carrière dans la Bundeswehr et à l'OTAN, Speidel (un père tranquille, docteur en philosophie) a été soumis, dans les années 70, à une campagne menée par David Irving - plus besoin de le présenter - qui a cherché à faire de lui un salopard de lâche qui avait livré Rommel à la Gestapo pour se couvrir.
Selon Irving, en effet, Rommel n'avait jamais fait partie de la conspiration et n'avait jamais cherché à se rebeller contre Hitler - ce que démentent évidemment tous les historiens sérieux ayant bossé le sujet. Mais transformer Rommel en un preux au service de son Führer préféré permettait au négationniste britannique de salir davantage la mémoire d'un authentique conjuré... Irving faisait ainsi coup double : Speidel était un mouchard préoccupé par l'idée de sauver sa peau, et Rommel n'avait point fait partie du complot (lequel complot - donc rempli de mouchards pas courageux - perdait du même coup, au regard de l'Histoire de la Mémoire, l'un de ses plus prestigieux représentants). Pire encore : Rommel ayant été contraint au suicide, Speidel, d'ami devenait meurtrier... Mais Irving n'est pas allé très loin : il se discréditera ultérieurement en 1) prétendant que Hitler n'a pas donné l'ordre d'exterminer les Juifs ; 2) admettant la validité des (faux) carnets du susnommé ; 3) rallié la clique des négateurs de la Shoah... Speidel, lui, est mort de sa belle mort en 1984. |