Bonjour,
Je me suis procuré l'imposante et semble-t-il incontournable biographie critique du Général Guisan que Willi Gautschi publia en 1989 pour la version originale (allemand) et en 1991 pour la traduction française. (Ed. Payot/Histoire)
De l'avis général, cette somme est la première étude réellement critique du rôle du commandant en chef de l'armée suisse pendant la Seconde guerre mondiale. (C'est le sous-titre de la biographie)
Concernant la ligne Masson-Schellenberg, le chercheur lui a réservé un chapitre qui est une synthèse dense à partir des rapports, des journaux (celui de Barbey, entre autres) et des fonds privés d'officiers du SR versés aux archives fédérales.
A partir des contacts "chaleureux" établis dès 1941 entre l'officier SS Eggen et le fils de Guisan, Henry, (le prénom du Général s'orthographie Henri) dans le cadre d'affaires commerciales - le fils Guisan agissant comme intermédiaire dans la vente de baraques en bois à la Waffen SS pour le front de l'Est et/ou pour les camps de concentration, là ce n'est pas très clair dans le compte-rendu de l'historien (*) - Gautschi reconstitue l'histoire de ces relations secrètes.
Les affaires de Guisan fils n'étaient pas illégales mais posaient des questions déontologiques sérieuses. Quand le Général Guisan en fut informé, il pria son fils de se retirer immédiatement du conseil d'administration de la firme Extroc SA et lui interdit à l'avenir d'autres activités de ce genre.
Mais le contact était établi. Eggen était un proche d'Himmler et de Schellenberg. Guisan fils avait déjà mis au courant le capitaine du SR suisse Paul Meyer de son contact dans la SS. Meyer en parla à son tour à Masson qui vit de suite les avantages d'une telle ouverture.
Masson informa Barbey , chef de l'état-major particulier de Guisan. Et Guisan donna son feu vert, sans en avertir les représentants du pouvoir politique, ce que Willi Gautschi estime être une initiative risquée.
Voilà, résumées, les conditions à l'origine de cette relation entre Masson/Guisan et Schellenberg.
Ce chapitre passionnant nous apportera peut-être de nouveaux éléments afin de mieux comprendre les motivations respectives des visiteurs secrets.
A suivre...
RC
(*) Page 499, W. Gautschi écrit : "Eggen, qui revêtait en même temps le grade de Hauptsturmführer SS. s'était rendu en Suisse pour négocier la livraison de "2'000 baraques pour le front de l'est", une affaire où il en allait de 22 millions de francs. Puis, à la page suivante, il ajoute : "Quant à l'affectation des baraques de bois livrées aux Waffen SS, les intermédiaires et les fournisseurs pouvaient à peine ignorer, car on était déjà fixé à cette époque, même en Suisse, sur l'existence des camps de concentration." |