Cher François Delpla,
Je voudrais réagir à un de vos commentaires précédents : « Dans le livre fort salubre des trois complices, l'armistice est à peine évoqué... alors que le gaullisme est encensé : il faudrait savoir ! »
Vous savez bien que parler du gaullisme, c’est parler de l’armistice. Le rejet de l’armistice est consubstantiel au gaullisme. C’est son acte de naissance, en quelque sorte.
Dans le livre, nous citons d’ailleurs l’analyse comparée que fait Antoine Prost de ces deux dates fondatrices que sont le 17 juin et le 10 juillet 1940.
« Que le 10 juillet l’ait emporté dans la mémoire nationale sur le 16 juin apparaît ainsi comme un transfert d’enjeux. On oublie l’acceptation de la défaite, c’est-à-dire la soumission à l’Allemagne et la fin de l’indépendance nationale, pour retenir le régime autoritaire, attentatoire aux libertés et aux droits de l’homme, imitateur des fascismes et complice du génocide. En faisant remonter la fin de la légalité républicaine au 16 juin, les hommes d’Alger refusaient tout à la fois la mort de la République et la disparition de la France. Ils ne dissociaient pas l’enjeu patriotique et l’enjeu citoyen. »
Antoine Prost (« La controverse juridique : 16 juin ou 10 juillet ? », in P. Allorant, N. Castagnez et A. Prost (dir.), Le moment 1940, actes du colloque d’Orléans, 18 et 19 octobre 2010, Paris, L’Harmattan, 2012, p. 91-99.).
En ce qui concerne notre livre, nous contestons vivement la tentative de Klarsfeld d’élaborer une histoire alternative ou fantasmée par laquelle Vichy aurait pu résister aux demandes allemandes. Pour que Vichy résiste, il aurait fallu qu’il soit « résistant », en quelque sorte. Ce qu’il n’a jamais été, puisque que ce fut, dès le début, un régime collaborateur, soumis à l’occupant. Comme le disait le général de Gaulle, la collaboration était inscrite dans l’armistice. Et la complicité de Vichy dans la solution finale est un drame de la collaboration. Tout est dans l’armistice.
Sur ce dernier point, je pense donc que nous sommes d’accord. |