Bonsoir,
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minuit.
Les Allemands notifient à Vichy qu'ils attendent dans une heure l'accord du gouvernement français pour pouvoir baser leurs avions sur la Tunisie et Constantine.
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00 h.05
Laval avise l'amiral Estéva que le gouvernement français a consenti de donner son accord à l'utilisation par les Allemands, des aérodromes de l'Afrique du Nord orientale.
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4 h.45
Le général Beynet (président de la Délégation française à la Commission d'armistice de Wiesbaden) avise que les Allemands, tout en se félicitant de la collaboration qui venait de s'ouvrir, demandent :
"1. De pouvoir s'assurer avant tout, par mesure défensive, la possession de nos bases aériennes de Tunisie
2. De préparer une action offensive par déploiement des moyens de combat allemands sur les terrains de la région de Sétif"
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5 h.23
Cette notification est répétée par Auphan à destination de Derrien, Estéva et Barré :
"Le chef du gouvernement a été conduit à accepter l'utilisation des bases aériennes par des forces aériennes de l'Axe, destinées à agir contre l'agresseur. Dans ce but, le commandement allemand prenait d'ores et déjà de nombreuses mesures préparatoires et demandait qu'on fît à ces avions l'avance à rembourser de l'essence disponible."
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7 h.
Alors que les premiers avions allemands arrivent en Tunisie, Estéva, Barré et Derrien sont avisés par Vichy que :
"Les Américains ayant envahi l'Afrique, les premiers sont nos adversaires et nous devons les combattre seuls ou assistés."
Ce message est confirmé (vers 15 h.35) par un télégramme de l'amiral Darlan adressé à toutes les autorités de Tunisie.
Les échanges télégraphiques entre Vichy et Tunis se poursuivirent toute la journée. Estéva, Derrien et Barré eurent beau protester mais, par obéissance aveugle à Pétain, ils se résignèrent à "accueillir" les troupes allemandes. Alors que des ouvrages de défense avaient été organisées autour du terrain et que dizaines d'avions allemands atterrissent à El-Aouina (près de Tunis), personne ne songe à résister.
Un dernier exemple de l'état d'esprit d'Estéva.
Ayant reçu l'ordre, vers 15 h. 40, d'assister les Allemands dans le déchargement de leur matériel au port de Bizerte, Estéva répond :
"(...) Hier, dès que le danger américain eut apparu, l'amiral Derrien de sa propre initiative, coula deux navires de commerce dans la passe d'entrée du port, de manière à interdire l'accès aux forces navales d'agression [*] Le général Barré donna des ordre analogues pour La Goulette, Sousse et Sfax. Il en résulte que, pour longtemps, aucun bateau ne pourra venir dans le port de Bizerte, ni dans celui de La Goulette-Tunis.
On ne pourrait faire grief à l'amiral et au général d'avoir pris au sérieux, comme c'était notre devoir à tous, les menaces d'agression américaine sur la Régence. (...)"
Pourrait-on conclure qu' Estéva, Derrien et Barré étaient disposés à repousser "l'agression américaine" c'est-à-dire l'adversaire désigné par Vichy et que, par obéissance à Pétain, ils se résignèrent à accepter la collaboration avec les Allemands ?
Bien cordialement,
Francis.
[*] il faut comprendre "forces navales
américaines"