Perplexe, en suivant avec le plus grand intérêt les débats, ici et
ailleurs, sur le courage des soldats dévoyés, ceux de la Légion wallonne en
particulier, je me suis interrogé sur la signification du terme "courage". A mon
avis, c'est le sens du mot et son acceptation qui font problème.
Les fiers Wallons, ceux de la Charlemagne, ceux de la LVF ont fait preuve
de courage, dit-on! Le braqueur d'un fourgon ou le trafiquant de
drogue qui risquent la prison ou la mort, ils leur en faut aussi du courage pour
perpétrer leurs forfaits. Et que dire des kamikazes qui lancent un avion contre
une tour et s'explosent dans une discothèque? Tous courageux! Un ami, qui m'est
cher et qui par une froide nuit d'hiver, plongea dans un canal pour y repêcher
une dame ayant perdu le contrôle de sa voiture, n'a plus qu'à aller se
rhabiller. Il fut courageux mais pas plus et plutôt moins que le
légionnaire SS.
Tous dans le même sac ? Un peu court tout de même !
Etymologiquement les latinistes savent que le terme
"courage" ne vient pas du latin mais était d'usage en ancien
Français. Nos ancêtres parlaient de curage qui vient de
cuer c'est-à-dire coeur. Ah! Voilà qui est
intéressant! "Coeur" ! Encore un terme
galvaudé ou passé de mode. Asteur (c'est du Wallon pour rester dans le sujet -
asteur signifie "de nos jours") Asteur donc, on ne dit plus: "il
a du coeur"; on dit "il a des tripes". Notre époque est triviale
et a peur des mots justes.
Que disent les dictionnaires? Courage = force morale; fait
d'agir malgré les difficultés; énergie dans l'action; fait de ne pas avoir peur;
force devant le danger ou la souffrance. Le terme s'oppose tantôt à paresse,
tantôt à lâcheté ou à peur.
En cherchant dans tous les sens (du terme), j'ai trouvé une sage parole du
philosophe Alain : "Le courage nourrit les guerres, mais
c'est la peur qui les fait naître". A méditer!
Egalement deux locutions "s'armer de
courage" - "prendre son courage à deux mains". Le
courage serait-il donc un objet palpable?
Décidément, nous n'avançons pas dans nos investigations! Et si nous
ajoutions un qualificatif à "courage"?
Le courage physique - le courage moral - le courage civique - le courage
politique, etc... etc...
Ah! Nous entrevoyons déjà une éclaircie!
Le courage physique conviendrait bien pour tous nos protagonistes. Je n'ai
pas mon médecin savant sous la main mais il nous dirait que le corps placé dans
un contexte exceptionnel sécrète une mystérieuse hormone réactive. A la
peur répondrait l'instinct de survie; à la colère répondrait la pulsion
criminelle...
(J'espère que mon médecin ne lira pas ces lignes). Le champ
appliqué au courage s'en trouve déjà singulièrement réduit. Les
états-majors militaires ont fort bien compris le mécanisme et se sont attelés à
conditionner ou à canaliser ces réflexes primaires par
l'entraînement, ... la mise en condition... que le terme est bien choisi!
Le courage moral? Euh! C'est une autre paire de manche! Tout méditant sur
le sujet et parcourant les rayons d'une grande librairie, je suis tombé par le
plus grand des hasards sur un petit livre au titre évocateur :
"Histoires de courage" de
Jean-François Deniau. Manifestement un signe du ciel.
Avant de poursuivre notre courageuse enquête, allons écouter ce qu'en pense
Deniau.... déjà en sous-titre: la capacité de dire non.
Bien cordialement,
Francis.