Bonjour,
"Un mal pour un bien" ? L'argument est désormais bien connu pour absoudre le régime de Vichy de ses crimes.
Quelques-uns des accusés de Nuremberg usèrent du même argument . Ainsi Walther Funk [1] longuement interrogé dans sa cellule par le psychiatre Goldensohn.
A propos de l'expropriation des biens juifs, Funk affirma qu'il était totalement opposé à ces mesures mais comme les premières lois d'aryanisation avait été promulguée avant son entrée au gouvernement, il se montra partisan d'une mise en oeuvre progressive du programme et d'une indemnisation convenable des Juifs dont les affaires devaient être vendues.
Les pogroms et plus particulièrement la "Nuit de Cristal" des 9 et 10 novembre 1938, aurait fortement effrayé Funk qui aurait fait part de sa désapprobation à Goebbels.
Goebbels m'a répondu que c'était de ma faute parce qu'il y avait longtemps que j'aurais dû éliminer les Juifs des affaires. Il m'a dit que le Führer allait sortir de nouveaux décrets.
Goldensohn fait remarquer que ces nouvelles lois furent rédigées par Funk. La réponse de ce dernier :
Ces lois étaient nécessaires pour empêcher les Juifs d'être floués.
Comme il paraissait douteux que les lois antisémites fussent destinées à protéger les Juifs, Funk répond que c'était exactement ce dont il avait peur, d'être mal compris. Les lois étaient discriminatoires contre les Juifs, dit-il, mais ce n'était pas lui qui les avait inventée. Ils les avaient signées et transmises afin que "
ne se reproduisent pas de nouvelles explosions spontanées contre les Juifs".
Enfin, l'instigateur de ces lois, selon Funk, n'était autre que Hjalmar Schacht [2], un
homme ambitieux, sans aucune loyauté, rejetant ses fautes sur les autres.
Le même Schacht, interrogé lors de son procès, affirma que s'il avait été ministre des Finances à l'époque des grandes actions antisémites de novembre 1938, celles-ci n'auraient pas eu lieu.
Bien cordialement,
Francis.
[1] Walther Funk, sous le 3e Reich, fut ministre de l'Economie de 1937 à 1945.
Reconnu coupable à Nuremberg de crimes contre la paix, de crimes de guerre et de crimes contre l'humanité, il fut condamné, le 1 octobre 1946, à la prison à vie.
En 1957, il fut libéré de la prison de Spandau pour raisons de santé.
[2] Hjalmar Schacht fut président de la Reichsbank jusqu'en 1939 et ensuite ministre sans portefeuille jusqu'en 1943.
Jugé par le tribunal de Nuremberg, il fut reconnu non coupable.