> La Milice a condamné 200 personnes à mort dans ses cours
> martiales.
> La Résistance (vraie ou fausse) a commis 15 000
> exécutions sommaires.
Ben voyons.
L'ex-anonyme s'efforce d'exonérer la Milice de ses atrocités. Pour ce faire, il procède à une nouvelle manipulation : il met sur le même plan les actions de la Résistance sur quatre ans (sans d'ailleurs citer ses sources sur ce chiffre de 15.000 exécutions sommaires) et les seules condamnations prononcées par les cours spéciales de la Milice au premier semestre 1944, sans évidemment faire référence aux meurtres perpétrés par celle-ci (sur courte période : 1943-1944, et surtout le premier semestre 1944), et sans rappeler l'existence de la répression spécifiquement allemande.
Alors effectuons quelques rappels.
L'historienne Gaël Eismann évalue à environ 3.100 le nombre de condamnés à mort et fusillés après jugement des tribunaux militaires allemands - voir Gaël Eismann, "L'escalade d'une répression à visage légal. Les pratiques judiciaires des tribunaux deu Militärbefehlshaber in Frankreich 1940-1944",
in Gaël Eismann & Stefan Martens,
Occupation et répression militaire allemandes 1939-1945. La politique de "maintien de l'ordre" en Europe occupée, Autrement, 2007, p. 129. Jean-Pierre Besse et Thomas Pouty, dans
Les fusillés. Répression et exécutions pendant l’Occupation (1940-1944), Ed. de l'Atelier, 2006, déterminent un total de 4.540 fusillés, dont près de 500 "exécutions sauvages" en 1944.
Il faut également tenir compte des exécutions massives. La guerre contre-insurrectionnelle menée par les Allemands a tué 12.000 Résistants environ, au combat ou après capture (assassinat, torture), ainsi que 3.000 civils (voir François Marcot, "Bilan de la répression",
in François Marcot (
dir.),
Dictionnaire historique de la Résistance, Robert Laffont, coll. "Bouquins", 2006, p. 774).
Le bilan mortuaire de la Milice et des organes répressifs de l'Etat français reste inconnu : au moins 12 fusillés après condamnation à mort par les Sections spéciales, 200 fusillés après condamnation à mort par les cours martiales instaurées par la loi du 20 janvier 1944... Les exécutions sommaires n'ont pu être chiffrées.
Il convient de ne pas oublier que près de 89.000 personnes ont été déportées de France dans le cadre de la politique répressive germano-vichyste (60 % seulement sont revenus de déportation) -
voir ce site, à ajouter aux plus de 75.000 Juifs assassinés.
> Dans les Balkans: deux millions de victimes civiles pour
> 20 millions d'habitants.
D'où sortent ces chiffres ? (auteur, titre, édition, page)
> En France : 150 000 pour 40 millions.
Foutaises.
Les pertes civiles françaises oscillent entre 264.000 et 450.000 morts.
> En URSS, les prisonniers sont morts (de faim pour la
> plupart) dans la proportion de 58 %
> En France : 2%
Pas comparable : les nazis n'ont pas cherché à affamer les prisonniers de guerre français (voir l'étude d'ensemble d'Yves Durand,
Les prisonniers de guerre dans les Stalags, les Oflags et les Kommandos 1939-1945, Hachette, 1994), alors que la politique nazie applicable aux prisonniers de guerre soviétiques au second semestre 1941 prévoit un vaste assassinat collectif par famine, maladies et mauvais traitements, avant d'évoluer en 1942 pour privilégier le travail forcé, de manière beaucoup plus inhumaine que vis-à-vis des prisonniers de guerre occidentaux - voir Christian Streit,
Keine Kameraden. Die Wehrmacht und die sowjetischen Kriegsgefangenen 1941 - 1945, Dietz Verlag, 1997 ; Christian Gerlach,
Kalkulierte Morde. Die Deutsche Wirtschafts- und Vernichtungspolitik in Weissrussland 1941 bis 1944, Hamburger Edition, 2000 ; Alfred Streim,
Sowjetische Gefangene in Hitlers Vernichtungskrieg. Berichte und Dokumente 1939-1945, C. F. Müller Juristischer Verlag, 1982. A l'Est, où est mise en oeuvre une stratégie génocidaire et d'exploitation caractérisée, Hitler ne mène pas la même guerre qu'à l'Ouest, avec qui il cherchera, tout au long du conflit, à négocier un accord pour contrer l'Union soviétique.
> En Grèce, on estime à 250 000 les gens morts de famine.
> (Richard Evans) La Callas a du se compromettre avec
> l'occupant pour donner à manger aux siens. Qui le lui
> reprocherait ?
Références
exactes de l'affirmation, s.v.p., sachant que la France a connu une réelle pénurie alimentaire, pressurisée qu'elle était par l'occupant, et que l'on n'y mangeait pas mieux qu'en Europe occupée, voire même moins bien - il y a unanimité des historiens sur ce point : voir en effet Robert Paxton,
La France de Vichy. 1940-1944, Seuil, coll. Points Histoire, 1999, p. 414-415 ainsi que Eberhard Jäckel,
La France dans l'Europe de Hitler,
op. cit., outre Richard Vinen,
The Unfree French. Life Under the Occupation, Penguin Books, 2007 p. 215-230 ainsi que, de manière générale, Alan Milward,
The New Order and the French Economy, Oxford University Press, 1970. J'y reviendrai plus précisément.
Et ne me causez pas du blocus britannique : Vichy n'a jamais obtenu le moindre desserrement d'un tel blocus... qui s'est en fait révélé parfaitement inefficace - voir l'étude définitive de Bernard Costagliola,
La Marine de Vichy. Blocus et collaboration, juin 1940-novembre 1942, Tallandier, 2009. Ce remarquable travail pulvérise les allégations vichystes quant à un fantasmatique double-jeu du Maréchal Pétain, lequel aurait finalement gagné un accord avec la Grande-Bretagne sur une disparition du blocus.
> Quant aux Juifs... on a assez parlé.
Même constat que précédemment :
l'ex-anonyme a l'habitude de comparer ce qui n'est pas comparable.