Ou parce que l'humanisme ne s'arrête pas aux frontières.
"Ne pas tuer d'Allemands" en 1941, n'est qu'une consigne tactique liée à l'analyse des avantages et inconvénients. Mais le but est bien la lutte contre les Allemands.
La responsabilité des Russes ? N'est-ce pas plutôt la responsabilité de la clique au pouvoir nullement plébiscitée ? Et aider les Russes, c'est aider à la fin de la guerre. Et combattre, c'est beaucoup plus. La considération que le monde a pour une nation, qui pour celle ci est un élément important de sa situation, car nul ne vit seul, ne se mesure pas seulement à sa population, ses richesses, sa culture, mais avant tout selon sa virilité. Celui qui est réputé n'avoir le désir ni la force de défendre son bien, celui-là est une proie désignée.
Aller, je continue dans la citation :
Les gens raisonnables et " arrangeants " sont durs d'oreille. Le choc du glaive de Brennus dans la balance, son Vae Victis, cela ne leur dit rien. Et pourtant à certains moment c'est ce qui règle tout.
Notre réputation de virilité, de valeur militaire, avait été terriblement atteinte en 1940. Les railleries des deux colosses, l'Américain et le Russe, étaient cruelles à subir. Certes les F.F.L., puis l'armée d'Afrique, celle d'Italie, la 1re Armée, avaient montré que le soldat français gardait sa valeur. Mais c'étaient des troupes de métier et en majorité composées de Nord-Africains, Africains, étrangers. Il était de toute autre portée que nos F.F.I., soldats sortis spontanément du terroir, démontrassent leur pugnacité, leur capacité à battre sur son terrain un ennemi puissamment armé et bien entraîné.
Ceci est évident sur le plan mondial. Mais cela touche aussi la nation prise en elle-même. Un pays qui a été battu, humilié, ruiné, ne peut reprendre son essor vers la renaissance s'il ne s'appuie sur une bonne conscience, la conscience de mériter son renouveau, de pouvoir porter la tête haute, d'être dégagé et lavé de ses souillures et de ses hontes par des actes de combat et des sacrifices, et quand bien même ceux-ci ne seraient-ils pas immédiatement payants.
Cela, beaucoup de gens dans le Bordelais, et M. R. Aron [ou BOISBOUVIER peut être ?] les suit volontiers, ne veulent pas le comprendre. C'est un pays qui n'a pas connu les souffrances directe de la guerre depuis le XVIe siècle, un pays de vie facile, de climat physique et moral un peu mou, ou le sens civique et patriotique était chez certains quelque peu dégradé. L'occupation allemande n'avait pas amélioré un tonus moral médiocre, et j'en connais des exemples qui eussent été inconcevables dans les régions du Nord et de l'Est où la fibre est plus rude, où la confrontation séculaire avec l'ennemi et les réalités de la guerre ont endurci les âmes, où l'on accepte les épreuves avec stoïcisme, sans se plaindre ni composer.
Amicalement
Jacques |