Husson écrit dans ce texte de 2006 :
si les historiens intentionnalistes confondent intention et décision, les historiens fonctionnalistes confondent le temps de la décision et celui de la mise en œuvre.
Je viens de me faire une réflexion que je ne m'étais point encore faite : si le fonctionnalisme a pignon sur rue, l'intentionnalisme, lui, n'a pas de réalité ! Pas plus en tout cas que la "cinquième colonne" française en 1940 ou le "complot juif pour la domination du monde" (symétriquement baptisé islamiste aujourd'hui par d'autres) : ce ne sont là qu'expressions forgées par le mépris, l'exclusion, la polémique de bas étage !
Alors certes il y eut bien, au début du XIXème siècle, des étudiants traités par Napoléon de "cagneux" et reprenant fièrement l'insulte pour s'autobaptiser, avec tout de même un embellissement orthographique, "khâgneux". Mais nul n'est obligé de suivre leur exemple.
Je mesure rétrospectivement combien j'avais raison ici même, il y a longtemps, de refuser cette étiquette d'intentionnaliste.
Comme en tout domaine, il y a surtout les bons historiens et les moins bons, les bonnes pages et les moins bonnes.
Il n'existe à ma connaissance, et heureusement, personne pour dire que l'action politique des nazis entre 1933 et 1945 découle de l'application mécanique d'un programme. Autre chose est de dire que Mein Kampf est une clé à ne pas négliger pour comprendre ce qu'ils tentent de faire, à côté bien sûr des facteurs conjoncturels, des réactions rencontrées etc.
Comme toute politique efficace, celle des nazis fait grand usage de l'opportunisme et révèle de grandes capacités d'adaptation.
Et comme le fonctionnalisme existe bel et bien, et se revendique comme tel, lui seul est justiciable du reproche de gommer un grand pan du réel : il est affecté d'une tendance lourdement fautive à examiner les faits au jour le jour, sans percevoir la moindre continuité, faute de la chercher. |