Il faudra un jour qu'on m'explique pourquoi on charge - ou décharge d'ailleurs aussi - les pré- ados et les ados des banlieues de toutes les turpitudes de la société néo-libérale sous contrôle... C'est toujours l'autre, l'inconnu, qui dérange ou attire; ça (nous) évite de penser à nos propres faiblesses et incompétences; c'est un peu ça, non ? Après tout, ces banlieues généralement aussi éprouvantes sur le plan architectural que socio-culturel ont été conçues et érigées pendant les républiques gaullienne, giscardienne et mitterrandienne et sous l'influence d'architectes qui se voulurent sociologues d'un avenir radieux... à vivre dans des cages à lapins sous un slogan qui aurait bien plu aux cadres et ministres technocrates du gouvernement Pétain : "métro-boulot/chômage-dodo". Le Corbusier, qui a directement influencé les architectes responsables de fameuses horreurs à moyen terme pourtant prévisibles comme les cités-satellites de mon enfance, fut d'ailleurs séduit par certains aspects de la révolution nationale. Pas de hasard ! Mais revenons à la langue. Si les fils et filles des classes moyennes empruntent effectivement des mots et des expressions à des minorités depuis les années 20, c'est parce qu'ils ont découvert qu'il était bien plus excitant à 16-18 ans "to make d'jazz" par exemple que de singer les codes des vieux et leur bien parler assommant. Chaque génération réinvente ses propres codes en pillant et détournant l'héritage des anciens pour l'adapter aux exigences de l'époque. Ensuite, les poètes, les songwriters, les scénaristes et les pubars s'en emparent à leur tour pour les transmuter en créations contemporaines artistiques et/ou marchandes, créations qui à leur tour influencent la langue au quotidien. Sans ce phénomène, pas de poésie contemporaine, pas d'expérimentations surréalistes, lettristes, beat, etc. Ou lors, c'est vouloir figer la langue des "zélites" (?) en la rendant ennuyeuse parce que... morte !
Bien cordialement.
RC |