incompréhension - La grande rafle du Vel d'Hiv - forum "Livres de guerre"
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La description du livre

La grande rafle du Vel d'Hiv / Claude Levy et Paul Tillard

En réponse à -3 -2
-1Accroche de Laurent Laloup

incompréhension de denis blanchot le vendredi 08 février 2008 à 08h20

Je comprends toujours pas ce qui vous scandalise. Ce n'est pas un effet de style, c'est une vraie interrogation.

Est-ce l'aberration de réfugiées internées au Vel d'Hiv par la République en 1940, alors qu'Hitler est leur ennemi mortel, et transférées à Gurs - la réalité de ce Vel d'Hiv oublié préfigurant le suivant - la réalité de Gurs - qui est bien un camp de concentration (selon le sens commun et surtout la réalité, et pas seulement le vocabulaire d'époque qui effectivement utilise très largement le terme concentration - il n'est pas connoté dans les années 30, comme aujourd'hui : pour forcer le trait, les scouts eux-mêmes l'utilisent pour leurs jamborees).

Gurs? On y vit par terre. On y meurt de faim, de maladie, de froid aussi (j'ai oublié de le dire dans la postface - mais l'on retrouve des prisonniers gelés au matin, les pieds pris dans les boues parce qu'ils/elles n'ont pas voulu uriner dans l'immonde cabane, la nuit - les morts par désespoir sont aussi nombreuses). On est traité à Gurs très en dessous du règne animal. On y meurt beaucoup plus qu'à Buchenwald à la même époque (c'est sans comparaison pour l'hiver 40/41).

Le terme camp de concentration pose un problème selon une perspective terminologique classificatoire (tout à fait justifiée et nécessaire) mais que Denis Peschanski lui-même destine à des discussions techniques. Il manque effectivement à Gurs, certains aspects que l'on trouve dans les camps nazis ou soviétiques (les brutalités systématiques, l'imprégnation idéologique notamment).

Lilo Petersen dit, comme un leitmotiv, et c'est très juste : "les Allemands faisaient crever, les Français laissaient crever. Toute la nuance est là." Même si je n'ai pas traité Gurs en tant que tel dans la postface, je suis en liaison avec plus d'une dizaine de victimes de ce camp (du Vel d'Hiv de 40, des rafles en Belgique, de la déportation du Pays de Bade vers la France etc) et toutes rejoignent cette constatation. J'ai également réalisé un grand article sur Gurs qui paraîtra à l'automne.

Le souci, et il est expliqué dans la postface, est le divorce entre la langue des historiens et celle des témoins. Ceux-ci sont encore vivants et, justement, témoignent. Etant donné qu'ils sont tous désormais octogénaires, il se pose un péril dont d'ailleurs Denis Peschanski est conscient qui est la substitution d'un terme technique neutre (camp d'internement)par nécessité universitaire à une réalité vécue concrète qui est atroce (camp de concentration).

Le problème est similaire, soit dit en passant, quand on transforme des "réfugiées" en "indésirables", ce qui est un alignement tacite et une minoration sémantique.

La solution peut éventuellement heurter, mais c'est la seule : parler de "camp de concentration français", et utiliser cette dénomination intégrale qui spécifie la différence qu'elle soit formulée façon Lilo Petersen ou façon Denis Peschanski (qui admet volontiers l'utilisation de la formule "camp de concentration français", il figure parmi mes interlocuteurs historiens).

Contrairement à ce que l'on peut penser a priori, il ne s'agit aucunement de marketing de l'horreur (dans ce cas, il faut lire Jonathan Littell, compiler les éloges qui lui sont faites, et se fâcher aux bons endroits - là, la mesure d'un scandale peut se justifier).

Il ne s'agit pas non plus de polémique (*), de concurrence de mémoire, de hiérarchie victimaire etc.

Je vous invite à laisser de côté vos a priori, à lire le livre (faites le acheter à une bibliothèque municipale si vous pensez qu'il s'agit de marketing), et à lire le témoignage de Lilo Petersen. C'est une parole de témoin. Les problématiques soulevées sont abordées dans la postface.
Cordialement
D.B.


(*) Exemple : si l'on souhaitait être polémique et ce n'est pas mon objet, Jeanne Merle d'Aubigné (qui est l'âme fondatrice de la Cimade, la structure française qui incarne le droit d'asile et qui est née justement Gurs)parle du "ghetto de Gurs". Evidemment, Gurs n'est pas Varsovie. Mais c'est bien massivement une ville concentrationnaire juive (troisième ville du département après Pau et Bayonne). Il faut se méfier, et là vous avez absolument raison, des abus de langage, des effets temporels de migration sémantique, etc, etc.

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