Bon voilà j'ai l'objet et, en suivant quelques exemples illustres, j'en commence le commentaire sans avoir tout lu.
Car l'introduction donne déjà une idée claire de la méthode, par sa manière de démolir Daniel Cordier. Je suis d'autant plus à l'aise pour le dire que je lui ai fait de gros reproches, qu'on peut lire ci-contre et dont je ne retire rien, dans l'affaire Chauvy-Vergès versus Aubrac.
Cordier a fait progresser l'histoire de la Résistance, et tous les historiens de ma connaissance le reconnaissent aujourd'hui même si certains ont un peu tiqué au départ, en dévoilant le premier manifeste d'Henri Frenay, datant de l'automne 40. Il comportait une clause antisémite : "Tous ceux qui serviront dans nos rangs, comme ceux qui s'y trouvent déjà, seront des Français authentiques. Les Juifs serviront dans nos rangs s'ils ont combattu dans l'une des deux guerres."
Baynac affirme qu'en exhumant ce texte Cordier dénie à Frenay tout droit au changement d'opinion. C'est le contraire qui est vrai, il fait oeuvre d'historien justement, en montrant que tout ne s'est pas fait en un jour. Mais il y a plus grave. Baynac passe sous silence le fait que, juste après la parution du livre de Cordier révélant ce texte, quatre dirigeants survivants de "Combat", le mouvement dirigé par Frenay, sont allés en corps constitué aux Archives nationales expertiser le document comme un faux, alors qu'il était authentique. Mais il y a pire encore : Baynac en fait une lecture philosémite !! Elle mérite citation :
"à lire sans préjugé les deux phrases de Frenay, il apparaît clairement que les précisions apportées exonèrent son auteur de tout soupçon d'antisémitisme : annoncer que les Juifs ne font d'ores et déjà l'objet d'aucune discriminaiton dans le MLN pose au contraire le scripteur en opposant frontal des premières lois antisémites de Vichy. Et d'indiquer qu'auront place dans la Résistance ceux qui auront combattu dans l'une des deux guerres donne l'assurance que nul ne sera rejeté de la Nation résistante, vu que, par définition, tous les hommes valides de plus de dix-huit ans, juifs, chrétiens, musulmans, non croyants, avaient été mobilisés pendant cette guerre ou lors de la précédente."
Je précise bien que ces lignes ne se prétendent pas exhaustives et que j'ai déjà repéré, dans le reste de l'ouvrage, des commentaires de textes plus fins et plus exacts. Mais la présence de celui-ci en introduction est fort inquiétante et invite à se demander ce qui meut le plus l'auteur : la haine de Cordier ou l'amour de Frenay, et le besoin éperdu de l'identifier avec Moulin, dans une nébuleuse résistante intérieure opposée à l'usurpation gaulliste. |