Obeissance a l'ordre - Les Bienveillantes - forum "Livres de guerre"
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Les Bienveillantes / Jonathan Littell

En réponse à -5 -4 -3 -2
-1Moratoire de G.P.

Obeissance a l'ordre de Etienne Lorenceau le dimanche 28 janvier 2007 à 11h57

Jacques Chirac dans la ceremonie sur les Justes au Panthéon a célébré ceux qui ont désobéi. L'obéissance à l'ordre, comme vous le soulignez bien, n'est pas une justification absolue et le droit international a établi ce précepte. On peut d'ailleurs sur ce sujet lire avec interet: Dinstein, Yoram. The Defence of 'Obedience to Superior Orders' in International Law. Leyden, Netherlands: A. W. Sijthoff, 1965
L'étude psychologique et sociale de l'obéissance à l'ordre reçu est par contre plus complexe puisque comme le démontre en passant Littell, le soc "moral" d'une société donne une force immense à ces ordres paradoxaux. Au moment où les exactions sont commises, elles paraissent profondément éthique et semblent relever du bien. Leurs exécutant "souffrent" réellement tous d'avoir à les exécuter (le mot n'ests pas trop fort). Le problème n'est donc pas tant de vilipender et juger à juste titre l'execution d'un ordre infame, que de démonter la structure dont l'ordre infame et son exécution ne sont que l'écume.
J'ai obtenu (sans aucune difficulté il convient de le souligner) que l'ouvrage de Milgram sur la soumssion à l'autorité soit inserré dans notre site Livres de Guerre. Des commentaires de qualités y avaient d'ailleurs été apportés par certains intervenants. Je devrai relire et ajouter le livre d'Etienne de La Boetie sur la servitude volontaire.

L'horreur que soulève la médiocrité des sinistres exécuteurs la Shoah est un immense tronc calciné qui nous cache la forêt d'un système politique dont nous ne percevons plus les ressorts: nous en perdoons donc l'enseignement.
Et si Littel nous touchait parce que nous ressentons confusément comment progressivement notre société retombe vers les mêmes errements: "actions sans acteurs", socialisme, nationalismes et rejet de l'Europe, racisme, politique d'anticipation des crimes et délits (voir Minority Report), abandon de l'égalité des chances au profit d'une égalité de traitement (égalité contre discrimination positive)...?
Toutes ces pentes sont présentes dans le livre de Littell. Son dialogue avec le colonel russe dans Varsovie est superbe; ses digressions sur la linguistique sous leur vernis d'érudition ne sont pas répétitives et touchent les profondeurs de la pensée. Les cauchemards sont quelque part nos cauchemards d'aujourd'hui.
Les confrontations polémiques dont l'alternative vertueuse est souvent absente, nous frustrent de la vérité qui s'impose alors incidamment: ce système rarement usité en littérature est rendu possible par l'inversion héroique. Les personnages principaux et secondaires sont bien construits et conduisent à la reflexion. Le roman historique lorsqu'il est bien documenté (et c'est vraiment le cas sur les différents sujets que je peux vérifier) gagne en crédibilité et favorise alors la rélexion éthique et politique. Il rejoint ce faisant l'ouvrage purement historique et fait un peu craquer les classifications commodes de la bonne conscience bourgeoise (nous les bons eux les méchants) qui s'aveugle sur l'évolution actuelle de sa propre société.

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