Ne pas occulter quand même le fait que la carrière de de Gaulle n'a pas été une chevauchée solitaire. Il a fait partie de l'entourage trés rapproché du Maréchal Pétain, au point de faire de lui le parrain de son fils. On peut supposer que cette protection n'a pas dû être nuisible à sa carrière. Ensuite, il y a eu rupture, et bien avant 1940, à propos d'une chicane de droits d'auteurs, lors de la parution de "La France et son armée". La carrière de DG aurait pu en souffrir, mais il parvint à intéresser à son cas la classe politique, et notamment Paul Reynaud, ce qui lui a permis de continuer à progresser, tout en acquérant une précieuse dimension politique. La tragédie de juin 40 fut aussi la sienne, à titre personnel. La France étant désormais gouvernée par un vieillard rancunier, il a compris qu'un longue traversée du désert allait clore sa carrière. Déjà, le titre temporaire de ses étoiles allait certainement se révéler révocable. Il a donc choisi la fuite en avant, et sortir du système "par le haut", dans un défi magnifique qui l'a porté à l'immortalité.
En ce qui concerne son audacieuse vision de l'armée de métier mécanisée, ne pas omettre qu'elle omettait complètement le rôle de l'aviation d'assaut. (Ce point a été discrètement rectifié sur les éditions ultérieures).
Ensuite, à un moment où les armées professionnelles s'avéraient les tremplins des dictatures, en Allemagne, en Italie, en Espagne, il est compréhensible que cette vision d'une armée prétorienne aux éventuelles ambitions politiques ait pu éveiller les soupçons des parlementaires.
Les anciens combattants s'agitaient beaucoup, et il y avait eu février 34. Ce n'est pas seulement par l'esprit rétrograde des chefs militaires que l'armée de métier mécanisée a été prudemment mise au placard.
Cette attitude de suspicion n'était pas si illégitime, à considérer les comportements des Weygand, de Lattre et consort, en juin-juillet 40. L'armée française avait beaucoup d'arrière pensées, au sujet du péril rouge. Bien plus que contre le péril nazi.
Pas un seul chef militaire n'a défendu cette république qui l'avait pourtant porté là où il était. |