Comme vous le savez (suite à "Ma dernière vie") les 2 divisions entrés au Tyrol-Vorarlberg étaient la 4e DMM et la 2e DIM + 1ere et 5e DB. Il n'y avait certes pas que des "indigènes" dans ces deux unités, mais disons que c'est là ce qui a le plus "marqué" les Autrichiens. Les DB sont assez vite reparties et les deux divisions marocaines sont restées un certain temps.
Thomas Matzec, le réalisateur, sans doute francophile, a axé tout son documentaire autour d'une histoire: celle d'une femme autrichienne de... 60 ans, plutot brune aux yeux noirs, qui cherche a retrouver son père biologique. Le doc commence sur une plage marocaine, avec la chanson "Que reste-t-il de nos amours", une plage où marche la dame, une photo de son père marocain à la main.
Ensuite, le doc montre la chronologie des évènements, depuis fin avril 45 jusqu'en 55. Nous étions les ennemis héréditaires de l'Autriche, depuis Napoléon. Toutefois, d'après le doc, et le livre du général Bethouart (La bataille pour l'Autriche), ce dernier s'est appliqué à considérer l'Autriche (un peu naïvement sans doute, une prof autrichienne me l'a encore récemment confimé)* comme une "amie" à libérer-nettoyer du nazisme. Il semblerait que l'aimable et exotique présence des Marocains ait oeuvré dans ce sens, notamment en ce qui concerne les "consignes de fraternisation".
Les "Dunkel", comme disaient au début les Autrichiens (les "sombres"), les "Dunkel" faisaient peur, à leur arrivée... mais ils se sont fait accepter, ils étaient parait-ils gentils avec les enfants et plutôt séducteurs avec les femmes. Ce qui redora leur image.
En marge de cette fraternisation appliquée surtout par les soldats sans grade, le général Bethouart fit beaucoup pour le relèvement, notamment culturel de ce pays. C'est maintes fois souligné dans le documentaire, qui ne passe cependant pas sous silence les difficultés d'approvisionnement, l'armée prélevant pas mal de nourriture tandis que les Autrichiens vivaient avec des tickets de rationnement. Le France n'avait pas les moyens de "nourrir" aussi une zone d'occupation.
Pour les relations culturelles et "fraternelles", Thomas Matzec précise que "nous sommes arrivés en ennemis héréditaires et repartis en amis" (repartis en 1955, ce qui laissa le temps d'effacer quelques bavures ou impairs qui auraient été commis dans les derniers jours de la guerre).
Pour l'anecdote émotionnelle, la dame du début retrouve la famille de son père, à la fin, dans l'Atlas, une famille plus que simple, vivant dans un village assez reculé. Son soldat de père est mort mais elle retrouve des demi-frères et soeurs, des tantes et oncles, qui lui réservent un accueil fort affecteux: échanges de photos, dépoussiérage du livret militaire, thé à la menthe etc...
Et je n'ai ressenti aucune ironie ni malignité dans le documentaire...
Pour en savoir plus, lire le livre du général Bethouart, "La Bataille pour l'Autriche".
* extrait du courrier d'une prof autrichienne:
En ce qui concerne les faits historiques - même si
l'Autriche a été officiellement considérée par les Alliés comme une " victime" de l'annexion nazie, il faut tenir compte du fait que l'Anschluss était désiré par la majeure partie de la population (98% ont voté en sa faveur); l'Autriche a fourni un pourcentage plus important de soldats SS que l'Allemagne (en relation avec le chiffre de la population). Au contraire de l'Allemagne, qui s'est penchée sur son passé, l'Autriche, grâce à la version officielle qui la consacrait pays victime, n'a jamais remis en question sa participation à la deuxième guerre mondiale et à l'holocauste. La "dénazification" a été tout à fait symbolique (en partie parce que les Francais, les Anglais et les Américains se sont montrés très cléments) et un grand nombre de magistrats, de fonctionnaires et de politiciens nazis ont rapidement retrouvé leur poste et leur influence après la guerre (les partis politiques ayant besoin de leurs suffrages pour accéder au pouvoir). Le parti de Jörg Haider, le FPÖ, est directement issu d'un noyau d'anciens nazis, et entretient d'excellentes relations avec les mouvement néo-nazis en Autriche et en Europe.
Bonne lecture, a plus tard.
Frédérique |