Bonsoir-jour,
C'est en vain qu'on cherchera un écrivain important dont l'œuvre n'aura pas été réduite et abîmée au cours de son engagement politique. D'un Gorki rentré en URSS cautionner par sa présence le régime stalinien à un Claudel faisant successivement l'éloge de Pétain et de De Gaulle en passant par Aragon en stalinien pur jus ou Drieu dans la cour de Doriot, chaque fois, leur talent semble s'évanouir au contact du langage politique.
La littérature n'a rien à espérer d'un flirt avec les discours partisans et la fréquentation des politiciens.
Attention, ça ne signifie pas que l'écrivain doit vivre et créer hors des questions du temps, mais un engagement littéraire intense est en soi une inscription "politique" singulière et irrécupérable par une idéologie.
Par les thèmes abordés et développés et à travers les audaces du style et les aventures formelles, les gendelettres eurent durant la première moitié du XXe siècle une influence importante sur leurs lecteurs et par là sur les mentalités. Il faut se souvenir que dans les années 30 puis sous l'occupation, l'édition française se porta bien. La lecture restait dans les années noires un loisir accessible.
Vercors en écrivant Le Silence de la mer ne voulait pas éditer une œuvre politique. Or, l'impact populaire de ce texte fut plus fort justement parce qu'il ne contenait aucun slogan, aucune "explication". En invitant ses lecteurs à faire fonctionner leur imagination et leur sensibilité, il proposait une véritabe œuvre littéraire dont le sens universel pouvait s'appliquer à tout régime d'oppression. C'est un grand roman de Résistance.
Bien cordialement,
RC |