
S'inspirant des mémoires du réalisateur Jean Devaivre qui rejoindra un maquis en 43, Bertrand Tavernier nous propose une plongée dans le cinéma sous l'occupation. Désireux de produire des films de qualité, les financiers allemands de la "Continentale" débauchèrent quelques uns des talents de l'époque : scénaristes, réalisateurs, assistants, opérateurs et bien sûr les comédiens les plus populaires d'avant-guerre. En évitant le manichéisme, le réalisateur expose les différents choix de ce petit milieu qui ne put rester en dehors de la guerre. A l'image du pays, le cinéma français fut plutôt attentiste et sut ne pas aller trop loin dans la collaboration alimentaire avec les nouveaux maîtres de la production à Berlin et à Vichy. On apprend aussi que c'est sur ordre du parti communiste que Jean-Paul Le Chanois accepta de travailler pour la "Continentale". Si quelques acteurs furent mis à l'index à la Libération et condamnés à des peines d'interdiction de tourner assez légères, les réalisateurs, du moins les bons, purent dans l'ensemble prouver au comité d'épuration que leurs oeuvres n'avaient pas été les hauts-parleurs de l'idéologie nazie, même si un Clouzot et un Tourneur eurent des ennuis à cause de certaines concessions aux thèses de la Révolution nationale qui affleurent dans leurs films.
Bertrand Tavernier a tourné un film nuancé qui, sans excuser les comportements opportunistes d'une profession très exposée, nous fait voir des hommes et des femmes pris entre leur désir de survivre et le refus de s'aplatir devant l'occupant.
Amicalement,
René Claude