Bonsoir Ralph,
Dans ses Mémoires, dites-vous, Noguès écrit:
*** "...j'ai decouvert aux annexes page
672, annexed XVIII, une lettre de moi soit disant autographe, personnelle et non
officielle, au Marechal qui etait non seulement mon chef mais un ami, sans
signature et sans formule de politesse.
Elle est truquee et je pense qu'en
particulier il a voulu me faire dire que je n'ai telephone a Michelier (l'Amiral
qui n'obeissait qu'a Darlan- c'est moi qui le dis)qu'a 3h du matin au lieu de 2
(avant qu'il ait transmis mon ordre de cesser le feu de 8 heures la veille).
***
Cette lettre autographe est datée à Rabat du 12 novembre 1942
à 10 h.30. Kammerer mentionne clairement que le document n'est pas signé.
Est-elle truquée? Je n'oserais pas l'affirmer! A ma connaissance, aucun
historien n'a mis en doute le contenu de l'ouvrage de Kammerer. Quoiqu'il en
soit, au bénéfice du doute, faisons confiance à Noguès.
Toujours Noguès:
*** Et il s'est bien garde de citer la
lettre du Marechal apportee par le Commandant bataille, tres importante, car je
prenais nettement position pour la cessation du combat et la reprise de la lutte
aupres des allies (pour conserver a la France, l'Afrique du Nord), que m'a
retourne le Marechal et l'a amene a me donner l'autorisationde traiter avec les
Americains et lui a fait envoyer le telegramme de l'accord tacite...."
***
Kammerer parle longuement de cette lettre sans en reproduire
le contenu pour la simple raison qu'elle ne fut jamais retrouvée. Le
commandant Bataille, porteur de la lettre, arriva à Vichy le 10 novembre peu
avant minuit. Pétain dormait. La lettre fut remise à Jardel, secrétaire général
civil. Il a été dit que, le lendemain, Pétain aurait remis à Bataille une lettre
accordant le blanc-seing à Noguès pour son action au Maroc. Nouveau
mystère! Rien ne confirme que ce document fut remis à Bataille. Nous n'en
connaissons que la version qu'en donne une note officieuse rédigée par les
services du Protectorat pour la défense de Noguès. Par ailleurs Bataille
lui-même s'est refusé à infirmer ou à confirmer la remise de ce pli. Qui faut-il
croire ? Pour ma part, cette note officieuse ne plaide même pas en
faveur de Noguès.
Toujours Noguès:
*** Page 420 du meme livre de Kammerer,
il m'attribue a tord un telegramme alors que le texte montre par lui meme que
son auteur est l'amiral Michelier Ct en Chef de la Marine parlant comme chef
independant de la flotte de haute mer et comme commandant du secteur de
Casablanca. C'est sans doute pour insinuer que je ne me suis decide a donner
l'ordre de cesser le feu qu'a 2h30 du matin le 11. ***
Je concède que ce télégramme aurait pu être rédigé par
l'amiral Michelier. Kammerer mentionne à nouveau que le document ne comporte pas
de signature et que l'original n'a jamais été retrouvé. Nous savons que le
contenu, attribué à tort peut-être à Noguès, fut communiqué aux commissions
d'armistice de Wiesbaden et Turin par télégramme du 11 novembre à 10h.30.
Noguès ajoute que de tous les documents - et ils sont
nombreux - un seul dit la vérité: le rapport d'opérations du général Juin. J'ai
tout de même l'impression que Noguès se démène comme un diable dans un bénitier.
Les textes officiels, dit-il, se rapportant à cette période au
Maroc auraient été détruit pour cacher la vérité tandis que les textes
l'accablant seraient des synthèses tendancieuses. ! Que dit Noguès des
télégrammes dûment signés et répertoriés qui ne sont pas des synthèses ? Il nous
rétorquera que ces télégrammes sont volontairement ambigu pour ne pas éveiller
les soupçons des Allemands ? Nous voulons bien le croire mais tout de
même!
Toujours est-il que le sang franco-américain aurait pu être
épargné sans l'obstination de Noguès.
A la conférence de Fedala, le vent a tourné et les choses
s'arrangent. Patton, bouillant militaire qui se fiche royalement de la
diplomatie, qui n'a rien compris des subtilités de la politique française, passe
l'éponge et s'estime le soldat le plus heureux du monde depuis
que Noguès, enfin rallié, lui accorde toutes les facilités logistiques
souhaitées. Le brave Patton en oublie même de libérer Béthouart qui croupit
toujours dans les geôles de Noguès.
Bien cordialement,
Francis.
PS. Connaissez-vous les textes incriminés? Sinon, c'est très
volontiers que je vous les reproduirais... moyennant un peu de patience car mon
scanner refuse de lire mes vieilleries aux pages patinées, couleur terre de
Sienne brûlée, piquetées de tâches de moisissures.