Au risque de passer pour un hurluberlu, j'ai de plus en plus tendance à penser que la lecture des articles LITTERAIRES de Daudet (et de quelques autres plumes ) dans le journal "l'Action française" fut pour la génération Aragon, Drieu, Malraux,etc. ce que sera Sartre et les "Temps Modernes" ou "Tel Quel" pour la génération 68 : une sorte d'école de formation de l'esprit critique pour aborder les nouveaux courants littéraires. Daudet fut un grand lecteur et il défendit des écrivains qui étaient souvent en guerre contre Maurras. Il reniflait son époque et fut l'un des premiers (avant la NRF) à vanter les mérites et le génie de Proust ou à célébrer le ton moderne d'un Morand ou encore la poésie électrique d'Apollinaire...En lisant les Mémoires d'un Claude Roy, on se rend bien compte de l'influence des pages culturelles du journal monarchiste sur celles et ceux qui auront 20 ans entre 1940 et 1944; Roy fréquenta les Camelots du Roi et il admit que le talent critique de Daudet y fut pour beaucoup.
Bien sûr, ça n'excuse pas les ignominies publiées par "l'Action française" dans les pages politiques, mais tous les anciens lecteurs reconnaissent qu'un ton libre régnait dans la chronique littéraire : Déon, Haedens et quelques autres y firent leurs premières armes et ils ne sont pas tous devenus d'infréquentables ganaches fascistes...!
C'était un canton bien étrange la littérature entre 1918 et 1940.
Amicalement,
René Claude |