Bonjour,
Robert Murphy, appliquant avec zèle les ordres de Roosevelt qui ne voulait pas entendre parler de de Gaulle et des gaullistes comme futurs partenaires politiques en Afrique du Nord - des gaullistes regroupés et organisés par René Capitant depuis 1941 (*) - misa sur deux, puis trois "chevaux" : Darlan, Giraud et enfin Juin, créant (ou augmentant )ainsi toutes les conditions pour l'invraisemblable confusion qui allait marquer les jours qui précédèrent le débarquement allié (américain).
Car, comme l'écrit Anne Laurens :
" Bien sûr, Robert Murphy est certain d'avoir été discret. Il n'a fait de confidences qu'à Roosevelt qui n'en a fait qu'à Churchill, les deux hommes étant d'accord que si Darlan passait dans le camp allié avec la flotte, il faudrait le recevoir à bras ouverts. Mais la situation est beaucoup plus compliquée. D'abord les deux conspirations - celle de Darlan et celle de Giraud - sont étroitement imbriquées puisque les fils s'en rejoignent entre les mains de Murphy. Ensuite interviennent beaucoup trop de gens qui se font mutuellement confiance. Le colonel Chrétien, par exemple, est en bons termes avec le général Revers, en été 1942, chef du cabinet militaire de Darlan. Venu à Vichy en liaison, Chrétien avertit donc Revers - dans le plus grand secret, naturellement - que le débarquement est pour le 15 novembre au plus tard, et vraisemblablement avant cela. Revers admet alors que Darlan souhaite se rapprocher des Etats-Unis. Chrétien offre de faciliter les choses. Il repart finalement mandaté par Revers et Darlan, chargé de faire à Murphy des offres extrêmement précises. Mais pour rencontrer Murphy, Chrétien a recours à l'aide d'Henri d'Astier de la Vigerie ( qui a un frère chez de Gaulle et l'autre dans le Résistance ). Henri d'Astier, de plus, est royaliste, ancien officier du Deuxième Bureau, et travaille pour le Comte de Paris, tout en maintenant le contact avec Lemaigre-Dubreuil. Chrétien lui ademandé de trouver une villa discrète pour sa rencontre avec Murphy. D'astier propose l'endroit rêvé à Guyotville... dans la propriété d'un ami qui fait partie de Combat. C'est cela la secret !" (p.175)
On peut donc dire que Murphy , en alimentant le feu sous le chaudron algérois par ses complots et ses "favoris" (Darlan, Giraud et Juin, qui se retirera très vite pour se mettre aux ordres du premier), a une part de responsabilité dans la confusion qui causa la mort de jeunes gens, d'officiers français et de soldats américains durant la nuit algéroise de neutralisation puis la matinée du débarquement.
Anne Laurens : "Hélas, aucun des préparatifs d'Alger n'empêchera la nuit du débarquement soit une nuit de mort. Car, les Américains, se méfiant de leurs amis français, ne leur ont pas vraiment indiqué les heures et lieux du débarquement. Ils ont fourni des indications inexactes de sorte que c'est en vain qu'Alger sera paralysé toute la nuit et jusqu'à dix heures le lendemain matin, en vain que Béthouart neutralise Noguès (note : au Maroc), que Monsabert attend patiemment à Blida un Giraud qui n'arrive pas. Le débarquement se déroule donc dans une terrible confusion, semant sur les plages et dans les ports, des ports qu'on aurait parfaitement pu éviter."
Bien cordialement,
René Claude
(*) Maître du Droit Privé, après avoir enseigné à Strasbourg, René Capitant suivit la faculté repliée à Clermont-Ferrand. Il s'était fait nommer à Alger en 1941, car il était sûr qu'un débarquement allié aurait lieu sur les côtes d'Afrique du Nord. Avec sa femme, il entreprit alors de monter les premières cellules de résistance, en liaison avec Combat-Métropole. C'est Jean L'Hostis et le colonel Jousse qui, souhaitant que les gaullistes fussent avertis et intégrés, affranchirent Capitant à propos de la date de l'événement. |