Bonjour,
Faut-il s'en tenir aux seuls aspects militaires d'un conflit
sans, à un moment ou un autre, s'interroger sur sa dimension politique ou
idéologique? C'est particulièrement vrai pour la Wehrmacht au service d'un
régime monstrueux. N'appréhender que les seules valeurs militaires rend
cette armée fascinante alors qu'elle était le bras armé d'une idéologie
criminelle.
Plongé dans la lecture des entretiens entre le Français Hélie
de Saint Marc et l'Allemand August von Kageneck ("Notre Histoire 1922-1945",
éditions des arènes, 2002), von Kageneck propose un début de réponse:
**** Peu à peu, le regard que je portais
sur mon histoire s'est transformé. A quelle monstrueuse entreprise avais-je été
mêlé? Un jour, la lecture d'un livre d'un juif letton, Meir Levenstein, sur les
souffrances endurées par son peuple m'a ouvert les yeux. Arrêté par la police en
juillet 1941 et livré aux Allemands, il raconte son calvaire jusqu'à sa
libération. Ce livre produisit sur moi un effet comparable au Journal d'Anne
Frank. J'en ai pleuré, en pensant: "Cet homme a enduré cela parce que
j'ai fait partie d'une armée qui a rendu possible ces actes."
Cette lecture marqua dans ma vie un
bouleversement personnel et spirituel qui me poursuit encore. Dans ce mystère du
Mal tel qu'il s'est déchaîné pendant la Deuxième Guerre mondiale, une chose est
pour moi incompréhensible, c'est le destin du peuple juif (...). Pourquoi? J'ai
beaucoup médité, jusqu'à écrire un roman, intitulé les Maudits, où je
me suis glissé dans la peau d'un SS gardien du camp d'Auschwitz pour tenter de
pénétrer la psychologie de ces hommes. En vain. ****
Bien cordialement,
Francis.