Mon père a été recruté par Jean Cavaillès, comme son frère aïné Jean qui était Normalien, à la cafétaria (qui devait s'appeler autremeent à l'époque) de l'Ecole Normale Supérieure rue d'Ulm.
Je ne connais que (vaguement) deux missions "violentes" qui lui aient été confiées par Cohors. L'une fut de jeter un sac de grenade depuis le métro du pont Bir Hakeim sur le nid de mitrailleuse qui contrôlait la Seine depuis la chaussée en contrebas. L'autre est d'avoir fait sauter des locomotives dans une gare de triage en banlieue de Paris.
En raison des représailles très dures (prisonniers fusillés) mon père demanda à être affecté aux filières d'évasion de pilotes alliés en zone libre grâce à la chaîne de relais sûrs que lui et sa famille avaient constituée entre Paris et l'Espagne pour les familles Juives en fuites. Lui et son compagnon J. Moulinier (charbonnier à Versailles) furent dénoncés par un membre du réseau portant le joli nom de Filoche. Ils tombèrent donc dans une souricière en 1941. Comme ni l'un ni l'autre ne voulait donner de noms (ce qui permit au réseau de survivre), ils furent tous deux internés à Fresne et répétitivement torturés pendant plusieurs mois et physiquement, mais pas moralement, détruits. Moulinier fut relâché après de nombreux mois car sa femme, cuisinière émérite travaillait pour un général allemand important (je ne me souviens plus lequel) qui plaida sa cause et, à la même période, mon père fut envoyé d'abord à Buchenwald avant d'être beaucoup plus tard déclaré NN et transférré à Flossenburg puis Mauthausen/Ebensee.
Mon oncle Jean (nom de code "Laurent") par qui mon père avait rencontré Jean Cavaillès et qui avait semble-t-il, au moment de son arrestation, un rôle assez important dans les MUR du quart nord Ouest, ne fut pris que des années après et fut déporté à Dachau le jour du débarquement en Normandie.
La soeur de Jean Cavaillès a écrit sur sur son frère ainsi que Georges Canguilhem le philosophe, psychologue, médecin de renom, qui était son ami et admirateur
Mon père et son frère gardèrent jusqu'à leurs morts respectives une admiration sans borne pour l'intelligence et la passion résistante de Jean Cavaillès |