Bonjour,
Comme l'écrit si justement Jacky Panneels, on n'est jamais déçu avec les livres de Pierre Miquel sur les deux guerres mondiales.
C'est solide, bien documenté et bien tourné. Son approche de "L'Exode" lui donne l'occasion de "digresser" sur le réarmement clandestin de la Reichswehr durant les années 20. Ses chefs purent compter sur la complicité des grands industriels allemands.
Un exemple : je ne savais pas que Krupp s'était approprié en 1927 le tiers des actions de la société suédoise Bofor qui mettait au point ses canons antiaériens à tir rapide si redoutablement efficaces treize ans plus tard. Le 2e Bureau français est informé de ces opérations clandestines qui datent d'avant la mainmise des nazis sur l'Allemagne. (L'Umbau ou plan de réorganisation de l'armée, nous dit Miquel, fut imposé par von Schleicher dès 1932... Ce qui pourrait relancer le débat sur le germanisme agressif potentiellement très réactif d'une partie des Allemands, un sentiment ultra-nationaliste sur lequel Hitler sut jouer. Mais c'est un autre débat). Et c'est là que la différence de conception de la guerre moderne saute aux yeux : en 1929, lorsque les services secrets de l'Armée informent le gouvernement des pratiques allemandes et des accords passés entre l'état-major de la Reichswehr et certains pays européens (Suède, Suisse, URSS) pour expérimenter les nouvelles armes et les tactiques qui en découlent, les politiques s'enferment dans le concept de Défense statique et construisent la Ligne Maginot...
Ces digressions peuvent agacer certains lecteurs, j'en conviens, mais elles sont souvent riches d'éléments qui nous aident à mieux comprendre les causes d'un événement aussi important que l'exode de mai et juin 40. La désagrégation d'un grand pays en quelques semaines, la défaite de son armée réputée la meilleures de l'époque et la fuite des grands corps de l'Etat sont mieux appréhendés grâce à des informations qui peuvent sembler, à priori, n'avoir qu'un lointain rapport avec ces événements.
Bien cordialement,
René Claude |