Bonsoir,
Ladislas de Hoyos, journaliste d'investigation et chroniqueur judiciaire, s'attarde longuement sur la préparation du procès de Barbie et plus particulièrement sur les travaux des juges chargés d'instruire le procès. Débordés de monceaux de procès-verbaux, de commissions rogatoires, de cahiers d'expertises....leur tâche ne fut pas aisée. Et pourtant, cette masse de documents reste incomplète; il manque les archives de la Gestapo [1] de Lyon. Pendant la dernière quinzaine du mois d'août 1944, sur ordre de Berlin, tous les dossiers ont été brûlés.
- Le juge Christian Riss, chargé de l'instruction, reçoit alors une curieuse information en provenance de Buenos Aires. En apprenant par la presse l'arrestation et le transfert vers Paris de Klaus Barbie, l'ancien consul d'Argentine à Lyon, révèle qu'il avait résidé, de 1949 à 1953, dans l'ancienne maison occupée par Werner Knab, le patron de Barbie et qu'il y avait découvert dans une cache au fond du garage tout un lot de documents allemands. Le consul avait aussitôt remis tous les papiers au préfet de la région, Pierre Massenet. Avec ces indications, transmises d'Argentine par la valise diplomatique, le juge Christian Riss comptait bien retrouver ces documents. Malheureusement, le préfet était mort depuis quinze ans et sa veuve, comme ses proches collaborateurs, ne se souvenaient de rien.
- Une seconde piste s'ouvre pour le juge d'instruction. Lucien Doussot, un truand, agent de Klaus Barbie, interrogé en 1948, avait prétendu avoir porté deux casquettes : l'une pour Klaus Barbie et consorts et l'autre pour la Résistance. Profitant de l'affolement qui avait suivi le bombardement du 16 mai 1944, Lucien Doussot se serait emparé, avenue Berthelot [2], de deux valises pleines de documents. Il les aurait remis à un agent du réseau de résistance "Dupleix". On n'a jamais retrouvé ces documents [3].
- En 1986 paraît le livre d'Alexandre de Marenches et de Christine Ockrent,
Dans le secret des princes [4], qui révèle que l'anciens directeur de la SDECE [5] avait découvert, dans les locaux des Services secrets français, 10 tonnes d'archives de la Gestapo saisies à la Libération et restées secrètes. Ces documents étaient supposés contenir des preuves compromettantes pour certains résistants. Après quelques "remous" d'ordre politique, ces archives furent confiées à une commission consultative de la Résistance chargé d'examiner les documents et de donner son avis sur l'opportunité de les rendre publics. Ladislas de Hoyos ne précise pas ce que ces documents ont révélé. Il s'agissait en réalité de deux tonnes de papiers disparates et non pas dix, résidus de documents déjà étudiés et qui auraient dû passer au massicot après archivage sur ordinateur.
Bref, comme le remarque Ladislos de Hoyos,
le procès Barbie avançait ... à reculons.
Bien cordialement,
Francis.
[1] "Gestapo" : terme générique pour désigner tous les organes nazis de répression comme la Sipo-SD, section IV, ...
[2] Siège de la Gestapo à Lyon.
[3] Lors d'un interrogatoire en 1948, en Allemagne, Klaus Barbie reconnaissait que des documents avaient mystérieusement disparu juste après les bombardements de 1944.
[4] L'ouvrage est au catalogue de LdG :
ou clic sur la vignette en marge.
[5] SDECE : Service de documentation extérieure et de contre-espionnage. Alexandre de Marenches en fut le directeur de novembre 1970 à juin 1981.